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Yuans, euros et artifices artificiels

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Publié le 18 octobre 2011
830 mots - Temps de lecture : 2 - 3 minutes
( 2 votes, 5/5 ) , 2 commentaires
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Rubrique : Editoriaux

 

 

 

 

Au moment où j’écris ces lignes, le yuan [1] vaut environ 11,5 centimes d’euros. Or, si j’en crois les analyses d’un grand nombre de commentateurs, il semble que la monnaie de l’empire du milieu soit artificiellement sous-évaluée – on parle fréquemment de 30% ; c'est-à-dire que le yuan ne devrait pas valoir 11,5 centimes d’euros mais 16,5 centimes d’euros. L’idée que défendent ceux qui soutiennent la thèse d’une sous-évaluation du yuan (et donc d’une surévaluation de l’euro), c’est que le gouvernement chinois pratique une dévaluation compétitive, c'est-à-dire qu’il cherche à doper ses exportations en faisant baisser la valeur de sa monnaie.


Je ne doute pas un instant que mes lecteurs connaissent ces choses mais un bref rappel ne peut faire de mal à personne : avec un yuan à 11,5 centimes d’euros, un produit qui sort de l’usine à 1 000 yuans peut être vendu 115 euros tandis qu’avec une parité à 16,5 centimes, ce même produit vaudra 165 euros. En d’autres termes, pour les entreprises exportatrices chinoises, plus la valeur du yuan exprimé en euros est faible, plus leurs produits sont compétitifs à l’export.


Bien entendu, le corollaire de ce principe est aussi vrai : un produit vendu chez nous à 100 euros vaut 868 yuans en Chine avec une parité de 11,5 centimes d’euros pour un yuan et ne vaudrait plus que 607 yuans avec une parité de 16,5 centimes – dès lors, nos entreprises exportatrices deviendraient mécaniquement beaucoup plus compétitives sur le marché chinois.


L’idée selon laquelle Pékin aurait pu se livrer à ce petit jeu mercantiliste est tout sauf absurde. Le caractère autocratique du gouvernement chinois, les tensions inflationnistes et l’accumulation d’emprunts d’État américains et européens plaident tous en faveur de cette thèse. En revanche, chiffrer l’ampleur du phénomène me semble pour le moins hasardeux : le yuan comme l’euro sont les produits d’un système de planification monétaire – celui des banques centrales – qui, comme tout système planifié, ne permet pas de réaliser ce genre de calculs. Reste que l’accusation est plausible, admettons donc par hypothèse que le chiffre de 30% soit le bon.


Si c’est effectivement le cas, cela signifie d’une part que le gouvernement chinois soutient artificiellement les entreprises exportatrices chinoises mais cela signifie aussi, comme nous l’avons vu plus haut, qu’il pénalise artificiellement les entreprises et les particuliers chinois qui importent des produits. De fait, cette politique revient à faire financer au peuple chinois la compétitivité des entreprises exportatrices chinoises au moyen d’une perte de pouvoir d’achat.


De la même manière, Pékin pourrait obtenir le même résultat en utilisant le politique fiscale plutôt que la politique monétaire : il suffirait d’augmenter les impôts qui pèsent sur la population chinoise et d’en redistribuer le produit aux entreprises exportatrices afin qu’elles puissent vendre moins cher. Ce serait strictement équivalent [2] : les entreprises de l’empire du milieu exporteraient plus qu’elles ne l’auraient fait sans cette politique et ce sont les citoyens chinois, par l’entremise d’une baisse de leur pouvoir d’achat, qui financeraient l’opération.


Qu’on utilise la politique monétaire ou la politique fiscale, le résultat est le même : le gouvernement chinois a mis en place une politique qui consiste à faire financer une hausse de notre pouvoir d’achat (nous payons les produits « made in China » moins cher) par une baisse du pouvoir d’achat de sa propre population (ils payent leurs importations plus cher). C'est-à-dire que, aussi incroyable que cela puisse paraître, les Chinois sont en train de subventionner notre niveau de vie.


Vous pensez que j’exagère ? Poussez simplement le raisonnement : que ce passerait-il si Pékin devait décider de subventionner ses exportations non pas de 30% mais de 100% ? C'est-à-dire si la Chine inondait littéralement nos marchés occidentaux de produits gratuits [3]. Pensez-vous que les Chinois s’enrichiraient à nos dépens ?


Et pendant ce temps, M. Dassault n’en finit plus de pester contre la « surévaluation de l’euro » qui, selon lui, explique pourquoi son Rafale [4] ne se vend pas à l’étranger. Je n’ai pas la prétention d’être un spécialiste du marché hautement politisé des avions de combat, mais il y a en revanche une chose que je sais : quand M. Dassault réclame que la Banque centrale européenne laisse filer la valeur de notre monnaie, ce qu’il demande en réalité c’est que vous et moi subventionnions son chiffre d’affaire et ses bénéfices par une baisse de notre pouvoir d’achat. Forts de cette simple constatation de bon sens, vous devriez maintenant goûter toute l’ironie du discours politique.


---


[1] Les esthètes me pardonneront d’utiliser le nom de l’unité de compte (le yuan) en lieu et place du nom de la monnaie (le Renminbi).


[2] Bien que plus compliqué à mettre en œuvre et plus visible sur la scène internationale.


[3] Celle-ci, je la dois à Frédéric Bastiat : <a href=http://bastiat.org/fr/egaliser_les_conditions_de_production.html><i>Égaliser les conditions de production</i></a> dans la première partie des <i>Sophismes Économiques</i> (1845).


[4] Programme qui, sur la base de 286 avions, devrait finalement coûter 40,690 milliards d’euros aux contribuables français…


 

 

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Georges Kaplan ne s’appelle – de toute évidence – pas vraiment Georges Kaplan puisque Georges Kaplan est un leurre. Né en 1975 dans une grande ville du sud de la France qui fût autrefois prospère grâce à son port, Georges Kaplan a principalement quatre centres d’intérêts dans la vie : sa famille, la musique, les bateaux (à voile) et l’économie. Ceux qui le connaissent considèrent Georges Kaplan comme un « libéral chimiquement pur » qui pense pour l’essentiel s’inscrire dans la tradition de la pensée libérale classique française et celle de l’école autrichienne d’économie. Il gagne honnêtement sa vie sur les marchés financiers et publie régulièrement des articles sur son blog, sur Contrepoints.org et Causeur.fr.
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Les choses ne sont pas si simples (ou mieux, simplistes) les ventes Dassault ainsi que celles de Airbus, etc., amélioreraient grandement notre balance des paiements en plus de ce que dit à juste titre brennec.
Rien a dire sur le fond de cet article qui me parait parfaitement exact, cependant il est un point qui n'est pas abordé: quel est l'impact de cette politique sur l'emploi chez nous et nos entreprises?
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Rien a dire sur le fond de cet article qui me parait parfaitement exact, cependant il est un point qui n'est pas abordé: quel est l'impact de cette politique sur l'emploi chez nous et nos entreprises?  Lire la suite
brennec - 18/10/2011 à 11:33 GMT
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