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Cours Or & Argent

L’héritage du débat de l’école française sur la fausse monnaie dans la controverse monétaire autrichienne, 4ème partie et fin

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Publié le 06 mars 2015
1232 mots - Temps de lecture : 3 - 4 minutes
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La théorie moderne de la banque libre

 

La théorie de la banque libre a été réactivée avec la parution de l’ouvrage The Denationalization of Money de Friedrich von Hayek[1], où il défendait la libre concurrence dans l’émission des monnaies privées par les institutions financières, et où il soutenait que le marché déciderait, dans un système de libre concurrence monétaire, de favoriser certaines monnaies privées en fonction de la stabilité de la valeur monétaire. Pour Hayek, la dévaluation et la surévaluation monétaire ont des effets néfastes sur les créanciers et les débiteurs, et le monopole d’émission de la monnaie par les banques centrales ne permet pas au marché de procéder au choix des monnaies les plus adaptées aux réalités économiques. Cette défense hayékienne d’une dénationalisation du système monétaire a inspiré le développement de l’école contemporaine de la banque libre, notamment avec George A. Selgin[2] et Lawrence H. White[3], ou encore Kevin Dowd[4] et Steven Horwitz[5]

 

Cette école de pensée s’inscrit dans la filiation intellectuelle de l’école bancaire (Banking School) en affirmant qu’en l’absence de banque centrale, les forces catallactiques du marché contrôleraient l’offre de monnaie, notamment la monnaie fiduciaire comme les billets de banque, et la quantité totale de dépôts et d’ouverture de comptes courants. Lawrence H. White parle de dépolitisation de l’offre de monnaie[6], ce qui signifierait décentraliser les décisions relatives à l’offre monétaire et à la détermination des taux d’intérêt auprès des banques commerciales.

 

La principale différence avec l’école française de la banque libre est que les théoriciens actuels considèrent les billets de banque comme une monnaie, alors que Courcelle-Seneuil les considérait comme de simples promesses de payer en monnaie effective. Il est intéressant de noter que la figure de Courcelle-Seneuil a été à l’origine de débats au sein de l’école autrichienne. Courcelle-Seneuil, qui défendait la liberté totale d’émission des billets de banque, avait en effet été professeur d’économie politique à Santiago (Chili). Le Chili avait alors un système de banque libre, c’est-à-dire sans banque centrale, et le système financier était stable, avec une monnaie-marchandise à 100% de réserves.

 

Mais Courcelle-Seneuil joua un rôle essentiel dans la transformation de la législation bancaire chilienne en un système à réserves fractionnaires à partir des années 1860. Cette nouvelle législation a malheureusement accéléré l’inflation de manière substantielle, ce qui a précipité en moins de cinq ans l’effondrement du système de banque libre chilien. Les milieux bancaires et l’élite politique ont alors coopéré étroitement pour mettre en place un système de banque centrale complet au Chili. Selon Selgin, l’un des plus éminents partisans du système à réserves fractionnaires, la cause de cet effondrement était due à l’intervention publique et non aux réserves fractionnaires[7].

 

Toutefois, cette résurgence de l’école bancaire a relancé le débat, et les successeurs de l’école monétaire ont vigoureusement critiqué les thèses des partisans de la banque libre à couverture partielle. Les principaux protagonistes étaient Jesús Huerta de Soto[8][9], Murray N. Rothbard[10][11][12], Guido Hülsmann[13][14] ou encore Hans-Hermann Hoppe[15]. Murray N. Rothbard a été considéré comme le successeur de Victor Modeste dans sa critique vigoureuse des réserves fractionnaires, frauduleuses à ses yeux.

 

La banque à 100% de réserves est définie par cette école de pensée comme une alternative au système de réserves fractionnaires pratiqué dans le monde entier aujourd’hui, où les fonds des comptes de dépôt à vue – notamment les comptes courants – seraient garantis par des réserves monétaires en espèces, disponibles à vue pour les clients qui souhaiteraient retirer leur argent au guichet, ou bien avec une garantie de remboursement ou d’échange en or dans un régime monétaire d’étalon-or.

 

Ce système, défendu vigoureusement par Rothbard[16], permettrait d’éviter l’inflation et la dette, protégerait l’épargne, stabiliserait les parités entre les monnaies, et éviterait des crédits et des investissements trop nombreux qui créent les conditions du cycle économique.

 

Conclusion

 

Comme nous l’avons constaté, les débats monétaires au sein de l’école autrichienne sont donc largement inspirés, sinon étrangement similaires à cette fameuse controverse des économistes français au cours de l’année 1866. Plus encore que l’école anglaise, l’école française d’économie politique est annonciatrice des grands débats monétaires au sein de l’école autrichienne et autour de la banque libre.

 

La grande innovation des économistes autrichiens est d’orienter la réflexion autour du dispositif bancaire des réserves fractionnaires au sein d’une plus vaste description positive du fonctionnement des cycles économiques, et d’un ensemble de prescriptions normatives dans l’optique d’une réforme monétaire qui aurait pour objectif principal de rétablir une véritable stabilité du système financier.

 

Il faut toutefois noter que si les économistes autrichiens diffèrent quant à l’attribution des causes du cycle économique à certains traits de fonctionnement du marché bancaire, Murray Rothbard, chef de file de l’opposition aux réserves fractionnaires, reconnaît que la banque libre entendue au sens de Selgin et White constituerait un système monétaire beaucoup plus solide que le système actuel[17]. Les partisans du 100% de réserves et des réserves fractionnaires se rejoignent donc sur la nécessité de la suppression du cours légal des moyens fiduciaires, sur la défense de la concurrence entre les monnaies, sur l’opposition à la banque centrale, et enfin sur la fin de la garantie publique des dépôts.

 

Mais ce fait ne doit pas nous empêcher de souligner la convergence assez troublante entre les économistes français du XIXe siècle et les économistes contemporains de la banque libre, à savoir une critique radicale du monopole de la banque centrale et une division doctrinale importante sur la question des réserves fractionnaires.

 

 

 

 

 



[1] Friedrich von Hayek, The Denationalization of Money: The Argument Refined. An Analysis of the Theory and Practice of Concurrent Currencies, The Institute of Economic Affairs, London, 1990 [1976]

[2] George A. Selgin, The Theory of Free Banking: Money Supply under Competitive Note Issue, Rowman and Littlefield, Totowa, N. J., 1988

[3] Lawrence H. White, Free Banking in Britain: Theory, Experience and Debate. 1800 - 1845, Cambridge University Press, Cambridge, 1984

[4] Kevin Dowd, The Theory of Free Banking

[5] Steve Horwitz, Monetary Evolution, Free Banking, and Economic Order, Westwiew Press, 1992

[6] Lawrence H. White, “Depoliticizing the Supply of Money” in Thomas Willett, Political Business Cycles: The Political Economy of Money, Inflation, and Unemployment, Duke University Press Books, 1998

[7] George A. Selgin, The Theory of Free Banking, op. cit

[8] Jesús Huerta de Soto, “A Critical Analysis of Central Banks and Fractional-Reserve Free Banking from the Austrian Perspective”, Review of Austrian Economics, 1995

[9] Jesús Huerta de Soto, “A Critical Note on Fractional-Reserve Free Banking”, Quaterly Journal of Austrian Economics, Vol. 1, n°4, Winter, 1998, pp. 41-46

[10] Murray N. Rothbard, The Mystery of Banking, Richardson and Snyder, New York, 1983

[11] Murray N. Rothbard, The Case for a 100 Percent Gold Dollar, Ludwig von Mises Institute, Auburn, Ala., 1991

[12] Murray N. Rothbard, Classical Economics: An Austrian Perspective on the History of Economic Thought. Vol. 2, Edward Elgar, Cheltenham, U.K, 1995

[13] Guido Hülsmann, “Free Banking and the Free Bankers”, The Review of Austrian Economics, Vol. 9, n°1, 1996 pp. 3-53

[14][14] Guido Hülsmann, “Free Banking and Fractional Reserves: Reply to Pascal Salin”, Quaterly Journal of Austrian Economics, Vol. 1, n°3, Fall, 1998, pp. 67-71

[15] Hans-Hermann Hoppe, The Economics and Ethics of Private Property: Studies in Political Economy and Philosophy, Ludwig von Mises Institute, Auburn, Ala., 2006 [1993]

[16] Murray N. Rothbard, The Case for a 100 Percent Gold Dollar, op. cit

[17] Murray N. Rothbard, What Has Government Done to Our Money?, Ludwig von Mises Institute, Auburn, Ala., 2005 [1963]

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Marc Lassort, diplômé de science politique à l’Institut d'Études Politiques de Bordeaux, et diplômé d’analyse économique du droit et des institutions à l’Université d’Aix-Marseille, est chercheur associé à l’Institut de Recherches Économiques et Fiscales (http://fr.irefeurope.org) et secrétaire général de l’Institut Coppet (www.institutcoppet.org).
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