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Les fils décousus

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Publié le 20 août 2012
1504 mots - Temps de lecture : 3 - 6 minutes
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Rubrique : Editoriaux

 

 

 

 

Tandis que les autorités des pays que l’on disait développés affichent la vacuité de leur vision et leur paralysie, dépassées par une crise financière dont ils ne veulent pas reconnaître les ressorts pour ne pas les combattre, une succession d’événements imprime au monde une autre tournure.


Le profond et irrésistible mouvement qui continue de traverser le Moyen-Orient domine, par delà la cruauté des événements en cours et les incertitudes sur ce qui en résultera. De vieux comptes historiques commencent à être réglés et continue de se manifester une aspiration à la liberté devant laquelle il est impossible de rester insensible en prétextant qu’il ne faut pas ouvrir la boîte de Pandore. D’une certaine manière, cet épisode prend d’autres relais. Celui d’une Amérique latine qui est largement parvenue à s’émanciper des dictatures ou d’un camp socialiste au sein duquel le rêve de capitalisme, auquel était associé la liberté, s’est heurté en Russie et dans son ancien glacis à de dures réalités et désenchantements.


Les enchaînements sont rapides, mais à chaque fois c’est la même chose, et il pourrait en être encore une fois ainsi au Moyen-Orient : les mondes lézardés s’écroulent mais ce qui leur fait suite n’est pas à la hauteur des aspirations, de vieux démons occupent les sièges laissés soudainement vacants. Ceux qui ne possédaient rien ou peu sont à nouveau dépossédés : la liberté est une condition nécessaire mais pas suffisante, surtout lorsqu’elle est contingentée par de nouveaux interdits.


Les Sud-africains en font l’expérience, qui voient ressurgir le fantôme du régime de l’apartheid sous la forme d’une tuerie de mineurs pour ne pas avoir associé la libération économique à leur combat antiraciste et laissé les pauvres (noirs) à la même place indigne dans la société. Les Chinois et les Russes témoignent de la même exigence de liberté face à des régimes moins dissemblables que leurs apparences le font croire. Le moteur de leur contestation y est le même : le mieux-être que connaissent les classes moyennes ne suffit pas si la liberté n’y est pas associée.


Un nouveau relais se prépare à être pris dans les pays développés. Ils sont secoués par une crise du capitalisme financier qui ne trouve pas d’issue et se traduit par l’exigence d’un impossible désendettement, inédit à cette échelle globale. On parle ici des « 99% », là des « indignés », mettant ainsi en évidence que la démocratie politique est aux ordres et la liberté économique inaccessible. Cette histoire-là commence à peine à être écrite, demandant de sortir des cadres étriqués de pensée et des conformismes ambiants.


Que va-t-il émerger de ces grands bouleversements en cours, qui ne sont pas réductibles à une explication élémentaire du monde et ne peuvent en conséquence susciter la montée en puissance d’un nouveau messianisme ? Les uns prédisent le chaos, comme s’il n’était pas déjà installé, les autres se réfugient dans la crainte de perdre un acquis menacé. Quoi d’autre en vue ?


La grande vague suscitée il va y avoir un siècle par la révolution russe n’a tenu pas ses promesses, depuis oubliées, pour ne retenir que son échec. Les débats d’alors, entre ceux qui pensaient qu’il fallait malgré tout y aller et ceux qui estimaient que les conditions n’étaient pas réunies, méritent d’être relus, mais c’est du ressort des historiens. Pour autant, rien ne nous interdirait de rétrospectivement nous interroger sur les raisons pour lesquelles cela n’a pas fonctionné, mais l’oubli et le rejet ont tout englouti, dommage ! L’avènement d’un monde reposant sur d’autres bases a été remis à des jours meilleurs et lointains, quand il n’a pas été abandonné, la place a été laissée libre.


Quelles promesses pouvons-nous lire dans ce qui est en cours ? Les prémices d’une autre organisation de la société sont encore bien ténus, ce qui confirme sans surprise que l’idéologie dominante est celle de la classe dominante. Aucun des grands mouvements de fond auxquels nous assistons n’est clairement porteur, à coup sûr, de son aboutissement proclamé. Les désillusions du passé font craindre la répétition de processus avortés, quand ils ne vont pas jusqu’au bout de leur logique et sombrent du fait de leurs propres contradictions, exposés à des tentations qui les pervertissent. On en a tant connu…


Décriée quand elle prend la forme d’un cosmopolitisme qui effraye ceux qui trouvent refuge dans un patrimoine rassis et oublieux de l’histoire, la mondialisation a pour objet d’élargir le terrain de jeu d’un système financier qui cherche à se reproduire à défaut de se corriger. Elle est pourtant porteuse, par son universalité, d’un avenir commun que masquent les différences d’histoire et de culture, d’organisation sociale et de niveau de vie. Et pourtant ! Le démembrement largement entamé, les seules barrières subsistantes destinées aux populations sommées de rester à leur place, plus rien n’arrête les vents qui balayent la surface, mais la différence et l’imprévu font peur…


Quand on y regarde de plus près, des aspirations communes se manifestent, des solutions émergent. Pêle-mêle, l’agriculture de proximité et de subsistance, les technologies à bas prix, les services gratuits accessibles via Internet, le développement de programmes sociaux comme la Bolsa Familia au Brésil en sont avec leurs limites des éléments constitutifs. Ils créent les conditions de nouveaux modes d’organisation de la société reposant sur l’auto-organisation et l’élargissement de la démocratie. Les problèmes se posent au niveau global, les solutions tout autant : c’est la nouvelle version du « Penser global, agir local ! ».


Les niveaux de confort qui sont atteints, là où c’est le cas et aussi inégalement répartis soient-ils, sont de toute façon menacés. Ni les progrès technologiques ni la découverte de nouveaux gisements d’énergie, ni le génie biologique ne pourront accomplir un miracle : des limites sont en passe d’être atteintes, le monde ne peut pas se développer sur le modèle emprunté par sa partie développée. Là aussi, il faut sortir du cadre. Ce levier-là est le plus puissant, ne souffrant aucun faux-fuyant, il induit une interrogation sur la nature des partages qui devront être effectués, le problème de l’accès à l’eau le résumant dès maintenant au mieux.


Nos modèles actuels sont dépassés. Soit parce qu’ils font obstacle à des aspirations qu’ils ont contribué à révéler, soit parce qu’ils ont été au bout de leurs contradictions et se désagrègent d’eux-mêmes, soit parce qu’ils supposent pour se reproduire des ressources inexistantes. Que pèsent les conservatismes et ce qu’ils charrient d’obscurantisme face à cette simple observation ?


Il est à ce stade d’usage de faire référence à la barbarie, cette option disponible quand rien ne va plus et rien ne s’impose pour succéder à ce qui a fait son temps. Que peut-il lui être opposé sinon une forme ou une autre d’espoir ? Dans les progrès scientifiques et technologiques, c’est-à-dire dans la connaissance ? Dans l’Humanité et l’espèce humaine, au nom de son sens inné de la survie, si tout du moins Eros l’emporte sur Thanatos ? Fragile mais ferme ligne de défense, il est vrai, quand on constate les dégâts causés par l’exploitation de la planète et des hommes, dont le fin du fin est aujourd’hui la domestication de l’énergie nucléaire et sera demain celle du génie biologique.


Quelle société sera capable d’encadrer ces nouvelles connaissances, afin de veiller à ce qu’elles ne soient utilisées qu’au bénéfice du bien-être de l’Humanité ? De remettre les échanges marchands et monétaires à leur place et d’assurer à toutes et à tous les conditions minimum d’existence que l’espèce humaine réclame de par son simple fait ? De s’affranchir des logiques restées primitives d’une accumulation financière qui ne l’est plus et contredit cette exigence ? De cesser d’assigner une fin à l’histoire, soit en lui donnant un sens alors qu’elle n’est en rien prédestinée, soit en prétendant qu’elle atteint le stade ultime et indépassable de son développement ? Autant de croyances qui ne sont plus de notre temps. En négatif de celles-ci se dessine un nouveau cahier des charges et de premiers éléments de réponse.


Nous sommes loin du sort réservé Julian Assange confiné dans les locaux de l’ambassade de l’Équateur à Londres pour une durée inconnue, des deux ans de travaux forcés auxquels sont condamnés les Pussy Riot, dans des camps qui n’ont pas tant changé depuis le Goulag, de l’exode forcée et sans retour des déplacés de Fukushima, ou bien encore de la recherche sans lendemain de leurs maris mineurs portés disparus par les femmes noires de Marikana. Mais tous ces événements, et bien d’autres encore qui ne sont pas projetés dans l’actualité, expriment la réalité de sociétés dont les fils décousus demandent à être renoués autrement.



Billet rédigé par François Leclerc


Son livre, Les CHRONIQUES DE LA GRANDE PERDITION vient de paraître


Un « article presslib’ » est libre de reproduction numérique en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.

 

 



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Paul Jorion, sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix dernières années dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié récemment L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain ? (La Découverte : 2007).
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Monsieur Leclerc tourne en rond, tel un rat dans sa cage, cherchant la sortie. Dommage qu'il manque cruellement de culture historique, qu'il reste à ce lamentable niveau naturaliste, et que, shooté à l'idéologie maçonico-mondialiste, il condamne "l'obscurantisme" du passé. Car, "La civilisation n’est plus à inventer, ni à bâtir dans les nuées. Elle a été, elle est: c’est la civilisation chrétienne, la cité catholique. Il s’agit de la restaurer sur ses fondements naturels et divins: omnia instaurare in Christo."
[Saint Pie X, 25/08/1910 : Lettre "Notre charge apostolique", § 11]
J'éviterai, à l'avenir, de lire ses "billets".
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La trame se délite lorsque les fils se décousent...
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Paul-Henry R. - 20/08/2012 à 16:42 GMT
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