A une époque où la notion d’« information », inconnue il y a deux siècles,
envahit le discours, on peut s’interroger sur ce qu’en devrait dire l’économie
politique.
Dans la décennie 1930, des économistes autrichiens (Hayek, etc.) s’y sont
référés.
Dans la décennie 1960, des économistes « mainstream » (Arrow, etc.) l’ont
assujettie aux canons de l’époque, supposés définitifs (utilité marginale,
quantité de marchandises) et rien ne semble changer.
Entretemps, l’« information » s’est imposée en physique avec, en particulier,
les travaux de Claude
Shannon mi XXème siècle … et les ordinateurs.
En économie politique, la notion d’« information » bringuebale aujourd’hui avec
le phénomène des « cryptomonnaies » à quoi des informaticiens ont donné
naissance fin décennie 2000 (dans le cas du « bitcoin »).
Malheureusement, leur inculture sur ce qu’on dénomme « monnaie » (en abrégé,
CQDM) est exemplaire et ne peut qu’avoir des conséquences déplorables pour leur
création.
Il y a cent ans, comme on le rappellera ci-dessous (section 2), CQDM était
encore un ensemble de formes d'état solide de la matière (pièces de
monnaie en métal, coupures de billets en papier, comptes bancaires), peu
réglementé par les hommes de l’état, toutes proportions gardées.
Les économistes s’y intéressaient dans leur étude comme un type d'état solide
de la matière valeur plutôt que comme une originalité
monétaire.
Ils ne considéraient pas qu’il y avait une offre et une demande de
CQDM(celles-ci sont apparues au début du XXème siècle).
Ils en restaient à la « théorie de la quantité de monnaie » du passé et aux
proportions entre les prix en monnaie et la quantité de monnaie à quoi donnait
lieu la théorie .
Tout a changé à partir de la décennie 1930 avec la multiplication, sans raison
(cf. ci-dessous Rueff), des réglementations par les hommes de l’état,
nationalement et internationalement.
En théorie, des économistes ont envisagé l’offre et la demande de CQDM et
oublié les réglementations.
Leurs travaux ont donné lieu à un marché susceptible de modifier les autres
marchés et, à ce titre, très sensible.
Ce fut l'émergence de la macroéconomie et l’économétrie.
On n’en est jamais sorti.
Information et cryptomonnaies sont-elles des « valeurs » à juxtaposer à la
liste des « valeurs » antérieures, celles de la « théorie de la valeur »,
origine de l'économie politique, ou à expliquer par ces dernières ?
Pour répondre à la question, je vais mettre le doigt dans cette « théorie de la
valeur » … dont la littérature sur le sujet est plus qu’abondante.
Mais je laisserai de côté la démarche marxiste de la pensée économique qui y
est la démarche traditionnelle et majoritaire.
Pour fixer les idées, je me limiterai à ce qu'ont écrit, au XIXème siècle,
Frédéric Bastiat (1801-50) et Vilfredo Pareto (1848-1923) et, au XXème, Ludwig
von Mises (1881-1973).
Il y a soixante-dix ans précisément, Mises a publié un traité d’économie
intitulé L’action humaine.
Cinquante ans auparavant, Pareto avait eu l’occasion d’enfoncer le clou du
débat en précisant dans son Cours d’économie politique (et de sa
théorie pure de moins de 100 pages), qu’il traiterait des phénomènes
résultant de l’action humaine.
Pour leur part, Bastiat et Pareto ont schématisé, à cinquante ans d’intervalle,
la « théorie de la valeur » en des termes analogues qui méritent attention
sinon que Pareto a pu y inclure une partie de son élargissement.
Bastiat (1850) a pris pour point de départ les propos d’Adam Smith (et ses
références à la matérialité et à la durée).
Reste qu’Henri Bergson (1859-1941) a expliqué dans son ouvrage intitulé
Matière et mémoire (1896) que, philosophiquement, la notion de «
matière » était antérieure à l’alternative entre réalisme et idéalisme,
laquelle était elle-même antérieure à l’alternative entre existence et
apparence.
Dans ces conditions, il était donc difficile de concevoir sereinement la notion
de « matière » ou de « matérialité ».
Pareto (1896-97) a repris Bastiat et complété ce qu’il avait écrit avec les
notions nouvelles d’« ophélimité élémentaire/utilité marginale » et de «
résultat d’action humaine » .
Curieusement, ni Bastiat ni Pareto n’ont parlé de « CQDM» (section 3) ni
du « prix » (section 4) dans leur recension de la « théorie de la valeur »
…
On ne peut que s’en étonner tant le public a l’habitude de dénommer « valeur »
le prix en monnaie d’une marchandise ... et tant des économistes s'attèlent à
comprendre CQDM.
Ils n’ont pas parlé non plus des « quasi matières » nouvellement découvertes au
XIXème siècle, comme les phénomènes d’ « onde » ou de « cycle » qu’avaient
mises en évidence les chimistes ou les physiciens… et qu’ont transposées
certains économistes dans leur domaine (Kondratieff, etc.) (section 5).
En particulier, quoiqu’ouvert à la physique, Pareto ne s’est pas formalisé que
les physiciens opposent les phénomènes naturels d’« onde » à la notion de «
corpuscule », élément de « corps », de « matière », bref de « matérialité
».
Il n'en a pas tenu compte.
Pourtant, cela remettait en cause la démarche de Smith sur la "valeur" avec qui
il s’entendait.
Faut-il voir dans l’« onde » une « valeur » d'un ordre autre que la
matière à juxtaposer aux « valeurs » existantes ou bien une
conséquence d’une des valeurs traditionnelles, par exemple, … de celles de
Smith ?
Ni Bastiat ni Pareto n’ont parlé, et pour cause..., de la « quasi matière »
nouvellement découverte au XXème siècle, … à savoir l’« information »
qu’avaient mise en évidence des chimistes ou des physiciens (section 6).
Ceux-ci l’avaient déduite du phénomène naturel d’onde.
Emise, l’onde était aussi reçue et sa réception par l'homme a été dénommée «
information » ou « donnée »… à défaut de résultat...
Faut-il voir dans l’« information » ou la « donnée » une « valeur » d'un ordre
autre que la matière à juxtaposer aux « valeurs » existantes ou bien
une conséquence d’une des valeurs traditionnelles, par exemple, … de celles de
Smith ?
Dans un billet de mon blog de mars 2017, j'ai eu l'occasion de faire apparaître
que Bastiat avait eu l’occasion de faire le point sur le "principe de la valeur
" en économie politique dans le livre intitulé Harmonies économiques
(1850, chap.5), titre qui lui-même n'était qu'une façon tacite de parler des
"résultats des actions humaines".
- pour Adam Smith (1723-90), ce qui était dans la « matérialité » et la « durée
» et donnait lieu aux objets matériels et services,
- pour Nassau Senior (1790-1864), une rareté.
Il n'y avait pas de distinction entre la physique de la nature et la valeur de
la matière.
Comme l'objet matériel, le service a été cerné par l’intelligence de l’homme
dès lors que celui-ci en recevait une, de sa part.
Peu a été écrit alors sur le sujet de l'utilité d'un service, peut-être est-ce
à cause de sa mesure et parce qu'il était difficile de donner une quantité
concrète à un service...
Comme pour
encadrer la notion de « valeur », il n’a pas hésité à parler de l’« utilité
générale » et de la décomposer en « utilité gratuite » et « utilité onéreuse »,
et de l’« utilité commune ».
Soit dit en passant, les propos de Smith ne doivent pas cacher
- une analogie entre l’« économie politique », nouvelle science alors, et la «
mécanique », science physique du moment, sur la distinction faite par les
savants entre la « matérialité » et la « durée », d’une part, et,
- d’autre part, leurs conséquences directes, comme les notions de « vitesse »
ou d’« accélération », ou indirectes, comme les notions de « quantité de
mouvement », de « force » ou d’ « énergie »…
Storch avait mis l’accent sur le jugement de valeur de la personne sur la «
matière », « chose » ou « bien », types de « valeur ».
A sa façon, J.B. Say a été plus original en ciblant les notions de « chose »,
de « bien » ou d' « objet matériel », et en introduisant la notion d'« utilité
» comme autre type de « valeur » qu’étaient celles-là (cf. un de ses livres
https://archive.org/details/coursdconomiepo02saygoog).
On peut aussi regretter que Say ait été flou sur la notion de "service",
l'autre type possible de « valeur » (« produit » incorporel et non pas
corporel, immatériel et non pas matériel) dans la perspective de Smith, et
diamétralement opposée à l'"objet matériel"…
… "Qu’entendez-vous par l’utilité ?
J’entends cette qualité qu’on certaines choses de pouvoir nous servir, de
quelques manières que ce soit.
Pourquoi l’utilité d’une chose fait- elle que cette chose a de la valeur
?
Parce que l’utilité qu’elle a la rend désirable, et porte les hommes à faire un
sacrifice pour la posséder.
On ne donne rien pour ce qui n’est bon à rien : mais on donne une certaine
quantité de choses que l’on possède (une certaine quantité de pièces d’argent,
par exemple) pour obtenir la chose dont on éprouve le besoin. C’est ce qui fait
sa valeur " (Say, op.cit., p. 12)
Malheureusement,
simultanément, il a considéré que la chose/bien/objet matériel… était une
qualité donnée à ce qui était cerné par l’esprit de la personne ... (cf. Say,
1815 et ce texte de novembre 2015).
N’écrivit-il pas dans son Catéchisme (1815) :
… "Comment donne-t-on de la valeur à un objet ?
En lui donnant une utilité qu’il n’avait pas." (Say, op.cit., p.
10)
Plus
encore que la "valeur" - si on peut dire... -, l' « utilité » donnée faisait
qu’elle était nécessairement subjective ?
Mais cela cachait une ambiguïté.
A sa façon, la notion d'"utilité" de Say a recouvert, implicitement, à la fois,
- le résultat de l’action humaine qu’était la valeur d'usage ou la valeur
d'échange et - les deux actions elles-mêmes.
Ce florilège de Bastiat sur l’utilité ne saurait cacher l'alternative ancienne
à quoi il ne faisait pas référence et qui a été reprise, par exemple, par John
Locke (1632-1704) entre « valeur d'usage » et « valeur d'échange ».
Elle s’articulait sur les propos d’Aristote ou de saint Thomas d’Aquin sur le
sujet de la « valeur » (cf. Gordon, 1964 ou Kauder, 1953).
Elle allait de pair avec le fonctionnement des droits de propriété, « récipient
à valeur » selon l’expression de Jacques Rueff (1896-1978) dans son ouvrage
intitulé L’ordre social (1945).
Elle ouvrait tacitement la voie en économie politique à l'action humaine
d'usage ("usus") et à l'action humaine d'échange.
Pour sa part, Ricardo n'avait pas été original.
Dans la droite ligne de Smith, de la « matérialité » et de la « durée » données
par le savant à partir de ce qui l’intéressait, il avait privilégié un objet
non matériel, un "service", à savoir le "travail", sans le savoir ou en le
sachant…
En mettant l’accent sur un des "facteurs de production" pris pour type de
valeur, il cachait le privilège donné par l’économiste, à la production sur
l'échange comme si la production était plus importante économiquement que
l'échange...
Au nombre de ces types de « valeur », il y avait la notion de « ressource »…
qui est une façon de parler d’un des facteurs de production (il est alors
question de « ressource », naturelle ou autre, plutôt que de « matière première
»).
On regrettera d’ailleurs que Say ait contribué à la confusion qui a consisté à
mettre en regard ce qu’il a dénommé « valeur » et la notion de « produit » :
Les choses auxquelles on a donné de la valeur ne prennent-elles pas un nom
particulier?
Quand on les considère sous le rapport de la possibilité qu’elles confèrent à
leur possesseur d’acquérir d’autres choses en échange, on les appelle des
valeurs ; quand on les considère sous le rapport de la quantité de besoins
qu’elles peuvent satisfaire, on les appelle des produits." (Say, 1815, p.
14)
La notion de « coût » a rassemblé divers types de « valeur » au nombre de quoi
le « coût de production ou le « coût d’opportunité » (cf. Buchanan,
1969).
Senior enfin n'avait pas été non plus original. Il avait mis l'accent sur un
aspect de la « matérialité » et de la « durée » de Smith qu'il avait dénommé
"rareté" (cf. appendice).
Enfin Bastiat a insisté en particulier sur le fait que :
… « C’est par pure métonymie qu’on a attribué la valeur à la matière elle-même,
et, en cette occasion comme en bien d’autres, la métaphore a fait dévier la
science.»
cf. http://bastiat.org/fr/echange.html 1850.
http://blog.georgeslane.fr/category/Ignorance-action-humaine-et-duree/page/147
Bref, Bastiat
faisait une différence entre matière et valeur différente de Smith.
b. L’ajout de Vilfredo Pareto.
Au florilège de Bastiat qu’il a évoqué dans son Cours d'économie
politique (et de sa théorie pure de moins de 100 pages), Pareto a
ajouté les considérations de :
- Karl Marx (1818-83) qui faisait référence explicitement à la "marchandise" et
au "travail" et dont lui-même n'a pas hésité à démontrer les erreurs (cf. par
exemple Pareto, op. cit. §18),
- Gustave de Molinari (1819-1912) qui expliquait la valeur par l'"intensité
comparée des besoins" (cf. ibid. §81) et
- W. Stanley Jevons (1835-82) qui a introduit le concept de "taux d'échange"
d’une marchandise en une autre (cf. ibid. §74).
Et son ouvrage a été l’occasion de développer deux notions :
- l’utilité marginale plutôt que l’utilité et
- les résultats de l’action humaine plutôt que l’action humaine.
i. Les notions d’ophélimité élémentaire et d’utilité marginale.
Pareto a insisté dans la seconde moitié du XIXème siècle sur la séparation à
faire entre ophélimité élémentaire et utilité marginale.
Pareto de préciser ainsi:
"L'ophélimité élémentaire est le final degree of utility de Jevons, la marginal
utility des auteurs anglais... "
Pareto a insisté dans son Cours sur le caractère subjectif et employé à cet
effet la notion d’« ophélimité » pour la distinguer de l’ « utilité … objective
».
Ce qui lui a permis de distinguer la notion d'"ophélimité élémentaire",
nouvelle alors, de l'ancienne qu’était la notion d' « utilité ».
Reste que Pareto fait partie de ces économistes qui ont adhéré, dans la seconde
moitié du XIXème siècle, à la notion d’ « utilité marginale » de la valeur,
etc. pour faire valoir le jugement que chacun pouvait donner à des éléments
ultimes de « valeur »…
L’« ophélimité élémentaire », l'"utilité marginale", de Pareto, allait ainsi, à
la fois, - être distincte du jugement de "rareté des choses" et - la dénommer
ainsi.
. Carl Menger oublié.
On peut se demander pourquoi Pareto a été muet sur, par exemple, Carl Menger
(1840-1921) et la précision que ce dernier a apportée à la « théorie de la
valeur » . Certes, c’était un contemporain. Mais Menger a développé le sujet de
la valeur dans son ouvrage intitulé Principles of Economics en des termes
analogues à ceux de Say, mais sans trop le citer:
… "La valeur n'est rien d'inhérent aux biens [...] [n'est] pas une propriété de
ceux-ci, ni une chose indépendante existant en elle-même. C'est un jugement que
les individus font de l'importance des biens [...] la valeur n'existe pas en
dehors de la conscience des individus" (Menger, 1871, pp.120-21)
Et
par la suite, il a été admis que, comme la notion d’ « utilité », la notion de
« coût » ne tombait pas du ciel, quelqu’un la dénommait ainsi, elle était
subjective : "Cost cannot be measured by someone other than the decision-maker
because there is no way that subjective experience can be directly observed"
(Buchanan, 1969, p.42)
ii. La notion de « résultat de l’action humaine ».
Pareto m'a intéressé en particulier car, dès le départ, il a écrit dans son
Cours qu'il ferait intervenir les « résultats des actions des gens »
et non pas les actions elles-mêmes.
Dès la première page du Cours d'économie politique, il prévenait
que:
… "Notre étude a pour objet les phénomènes qui résultent des actions que font
les hommes pour se procurer les choses dont ils tirent la satisfaction de leurs
besoins ou leurs désirs.
Il nous faut donc - d'abord examiner la nature des rapports entre les choses et
la satisfaction de ces besoins ou de ces désirs, et - tâcher ensuite de
découvrir les lois des phénomènes qui ont précisément ces rapports pour cause
principale." (Pareto, 1896-97, §3).
Il a
contribué à faire « observer », mais très brièvement et surtout
tacitement …, l’opposition qui commençait à se faire jour entre les
économistes autrichiens et les autres, sur l’alternative entre les « résultats
des actions humaines » et les « actions humaines » elles-mêmes.
Dans la foulée, il a laissé entendre son choix pour les « résultats des actions
humaines » ex post, dans quoi on peut voir une toute nouvelle façon de
parler de la « valeur », à juxtaposer à tous les types qui avaient été
introduits jusqu’alors.
Pareto n’en a pas moins verbalisé un nouveau type de « valeur » de la « matière
» (de la « substance » ou des « éléments »…), conséquence de ce que ces
derniers évoquaient indirectement, à savoir les « résultats des actions
humaines » tout comme traditionnellement les scientifiques de domaines autre
que l’économie politique s’intéressaient aux faits de la nature, « résultats
des actions » de celle-ci, avant de les théoriser.
Tacitement, il évoquait le débat du moment entre les économistes
qu'évoquait Asser (1893) quelques années plus tôt, à savoir entre économistes «
mainstream » et « néo économistes autrichiens ». Représentatif du raisonnement
« mainstream » de l’économie politique ou de la science économique, il s’était
insurgé, certes tacitement, contre des économistes contemporains qui se
voulaient originaux et ont été dénommés « autrichiens ».
Avec cette façon de s’exprimer, il se référait très vraisemblablement, mais
tacitement
- à l'approche "autrichienne", toute nouvelle alors, de l'économie politique
et
- à l'accent qu'elle mettait sur la notion d'« action humaine » (et plus
généralement sur la « praxéologie »), le "résultat de l'action humaine" pouvant
être considéré désormais comme un type de « valeur » par excellence.
Pareto a contribué à développer des hypostases en relation avec les notions de
"biens" et de "concurrence".
. Les néo économistes autrichiens.
Pareto a laissé entendre par son propos qu'il se séparait des auteurs «
autrichiens » pour conserver l'approche originelle de l’économie politique, à
savoir la « théorie de la valeur »,
Dans la seconde moitié du XIXème siècle, des économistes "autrichiens" ont
commencé à mettre l'accent sur les conséquences logiques des « actions humaines
», des actes économiques des gens plutôt que sur les résultats de ces actes,
étant donnés leurs intentions, besoins ou désirs et le fait que la réalité
économique n’était jamais que l’ensemble de tous ces résultats, observés ou
non.
Et, en 1949, un demi-siècle plus tard, Mises a publié son traité d’économie
intitulé L’action humaine.
3. Quid de CQDM.
Dans leur recension de la « théorie de la valeur », ni Bastiat, ni
Pareto ne voyaient dans la « CQDM » une valeur ou un type de valeur
particulier.
Longtemps, l'économie politique a procédé de la seule théorie dite "de la
valeur", la « théorie de la quantité de la monnaie » et la « théorie du
commerce international » deux théories antérieures mises de côté. (cf. ce
billet de mon blog de juillet 2014).
Malgré les débats du XIXème siècle entre l'"école de la pièce de monnaie" –
qu’il est habituel de dénommer « école de la circulation » en France
- et l'"école de la banque" ou entre le monométallisme et le bimétallisme, la
« pièce de monnaie » et les autres
formes de monnaie étaient
« intermédiaire récurrent des échanges » (cf. Say).
Et la
"quantité de monnaie" a donné lieu à une attention particulière après, par
exemple, l’article de Menger (1892) intitulé "La
monnaie, mesure de valeur".
Reste
que l’une des améliorations qu’ont
inventées les gens, et non pas les hommes de l'état, il y a bien longtemps, se
trouve dans la « matière » dénommée « pièce de
monnaie ».
La matière « pièce de monnaie » a été prise pour un
« intermédiaire récurrent des échanges » (cf. Say).
En effet, il est
un fait que l’échange de (droits de) propriété avec autrui est une action
humaine coûteuse qui conduit les gens qui la mènent à améliorer leur
position/situation/état économique, pour autant qu’elle a abouti.
Si elle n’a pas
abouti, c’est que son coût était trop élevé.
Dans ce cas,
l'échange a été jugé impossible, les gens incapables d'atteindre leur but à
cause des entraves (juridique, technique, économique ...).
On ne saurait
ignorer que l'invention des gens dans le passé a consisté à transformer
l’échange direct coûteux en échange indirect moins coûteux, l’échange
synallagmatique coûteux en échange catallactique moins coûteux.
Dans ce but, ils
ont pris progressivement, sans ligne directe claire, une matière pour un
intermédiaire récurrent des échanges dénommé « pièce de
monnaie ».
Sans échange
direct coûteux, sans échange synallagmatique coûteux, la matière « pièce
de monnaie » n’aurait pas vu le jour.
Mais avec la
« pièce de monnaie », des échanges indirects, des échanges
catallactiques, n’ont pas toujours eu lieu malgré tout.
En effet, la
« pièce de monnaie » est elle-même un type de matière qui cache un
coût que lui donnent les gens.
Elle est, le cas échéant, profitable pour son producteur ou ses
possesseurs.
On dira que, pour
que l’échange indirect ait lieu, il faut que le coût de la « pièce de
monnaie » soit inférieur au coût de l’échange indirect attendu.
S’il devient
supérieur, la « pièce de monnaie » ne peut que
disparaître.
Ponctuellement,
des échanges indirects, des échanges catallactiques n’aboutissent pas car le
coût de la « pièce de monnaie » y reste supérieur à leur coût.
Depuis qu’elle a été inventée, la « pièce de monnaie » a été
transformée par les gens malgré le monopole de production que s’étaient
accordés les hommes de l’état.
On est passé de l’ère « état solide de la matière » à l’ère
« bancaire » qui s’y est juxtaposée, puis, aujourd'hui, de l’ère
« analogique » à l’ère « numérique ».
CQDM n'a pas posé de difficulté aux économistes jusqu'au début du XXème siècle
où les hommes de l'état ont décidé de modifier sa réglementation
unilatéralement (avec l’interdiction de la conversion des billets et comptes
bancaires en or, convenue jusqu'alors…).
Cela explique
d'ailleurs que ni Bastiat (1850) ni Pareto (1896-97) n'ont particularisé CQDM
dans leur rappel de la « théorie de la valeur. », à cinquante ans
d'intervalle au XIXème siècle. La matière « « pièce de monnaie »
avait seulement amené à des nuances (invention des coupures de billet en papier
et comptes bancaires).
Reste que la proportion entre quantité de monnaie et prix en monnaie décrite
par la « théorie de la quantité de monnaie » dans le passé, a été
transformée, sans raison, en causalité entre quantité de monnaie et activité
économique (depuis au moins Fisher, 1911)
Les réglementations nouvelles, à partir de la décennie 1930, des formes de CQDM
existantes édictées par les hommes de l’état d’un grand nombre de pays ont
provoqué les difficultés économiques à venir qu'on connaît aujourd'hui,
Suite à de nouvelles réglementations nationales et, surtout, à maints accords
internationaux contre le principe de quoi Jacques Rueff s'était d’ailleurs
élevé dès leur naissance et avait mis en garde au début de la décennie 1930,
par exemple en ces termes :
"Un comité a prolongé l'oeuvre de la Conférence de Gènes, en lui donnant la base
doctrinale dont était dépourvue.
Il est connu sous le nom de Comité
MacMillan, du nom de son président, et siégea à Londres en 1930 et
1931.
On ne saurait exagérer l'importance du rapport MacMillan
[cf. cette
exégèse].
Il résume, avec une extraordinaire lucidité, toutes les tendances de notre
époque.
Il constituera, pour ceux qui l'étudieront, dans l'avenir, l'un de ces
monuments les plus caractéristiques et, probablement, l'une des étapes
essentielles sur la voie des catastrophes que nous sommes en train d'organiser
[...]
Je retiendrai seulement l'affirmation de principe qui figure dans son
introduction (p.4) :
"La caractéristique essentielle de notre époque, c'est le développement de la
conscience que nous avons prise de nous mêmes.
Tant en ce qui concerne nos institutions financières que nos institutions
politiques et sociales, nous pourrions bien avoir atteint le stade où un régime
d'organisation consciente devrait succéder à l'ère des évolutions spontanées
...
Nous sommes à la croisée des chemins et le futur dépend de notre choix"
Je ne suis pas d'accord avec cette conclusion [...]
Le problème de l'économie organisée, c'est le problème des vagues de la
mer.
Nous connaissons les forces qui les déterminent, nous concevons les conditions
auxquelles la solution du problème doit satisfaire, nous pouvons même la mettre
en équation ; mais, quant à la résoudre, nous n'y saurions songer." (J. Rueff,
1932)
Soit
dit en passant, Rueff a écrit cela après que, entre autres, Pareto se fut
formalisé de la réglementation de la monnaie et eut écrit en 1896-97 que
:
… "La plupart des pays s'imaginent obtenir des bénéfices en réglant l'émission
et la circulation de la monnaie, tandis qu'ils n'aboutissent de la sorte, qu'à
détruire une somme considérable de richesses".
Pareto eut, à
coup sûr, partagé le point de vue de Rueff s'il avait été encore en vie.
Par dénaturation réglementaire, CQDM (jusqu'au début du XXème siècle) a donc
laissé place par la suite à des « substituts de rien bancaires »
(« coupures de billet en papier » et « comptes bancaires »
non convertibles en or…) qui ont été dénommés malgré tout
« monnaies » et qui ont ouvert la voie non pas à la "paix des
monnaies", comme certains l'ont soutenu, mais à une « guerre des
monnaies » sourde.
Tacitement, en matière de monnaie, du fait des réglementations nouvelles,
certains diront qu'il y a eu passage de l'état solide de la matière à l'état
liquide, à la liquidité...
L’apparition actuelle des cryptomonnaies se déduit logiquement de l’évolution
passée, en dépit de l’augmentation des réglementations.
Elle fait apparaître la vanité à terme de ces dernières, l’amoindrissement des
coûts étant déterminant.
Ce que disent des cryptomonnaies les informaticiens n’a rien à voir avec tout
cela !
Un double fait est certain.
La monnaie n’est pas une hypostase, une représentation, un être susceptible de
manipulations qu'il déciderait.
Les « fonctions de la monnaie » qu’évoquent certains depuis le XIXème siècle,
ne sont qu’une façon de parler, elles ne doivent pas être identifiées à
l’hypostase « monnaie »…, ni à l’hypostase « marché de la monnaie »…
Sous ses formes actuelles, la monnaie n’est pas non plus un « actif » malgré ce
qu’en disent certains (depuis au moins Gurley et Shaw, 1960 et l’approche
comptable pernicieuse …).
4. La notion de « prix » ne serait pas une valeur.
Dans leur recension de la « théorie de la valeur », ni Bastiat, ni Pareto ne
voyaient dans le « prix » d’une marchandise une valeur ou un type de valeur,
ils n'en parlent pas.
Le prix était pourtant un fait observé.
C’était un fait qui accordait, en théorie, les échanges de « valeur » de deux
(populations d’)individus entre eux (cf. Cournot, 1838, Jenkin, 1870).
Et cela a donné lieu à la théorie de l’équilibre économique général, à la
macroéconomie, et à l’économétrie.
a. La notion de « prix relatif ».
Il y avait le fait ou la notion de "prix" … relatif d’une valeur dans une
autre, convenu entre les deux parties.
C'était le taux d'échange de Jevons convenu par les deux parties. Sans (droit
de) propriété, pas d’échange et sans échange, pas de prix.
Le « prix relatif » occultait, le cas échéant, - la notion de "marchandise",
autre type de « valeur », et - ses mesures, leurs nombres ou quantités ...
abstraites ou concrètes.
Il allait de pair avec les quantités d’échange de marchandises en
question.
Simultanément, ont été dénommés types de "valeur"
- des « prêts/emprunts » d’objets plus ou moins matériels, des « principaux »,
et
- leur mesure, leurs quantités ou nombres… etc.
Pour sa part, le "titre financier" en monnaie dénomme un (acte d')échange de
valeur (monnaie et autre type de valeur) entre un prêteur et un emprunteur « de
monnaie », nécessairement individus (et non pas populations) (cf. ce billet de
novembre 2013).
Et à leurs échanges convenus, devenus « titres financiers juridiques », ont été
associés des taux d’intérêt, autre types de « valeur ».
Le "titre financier juridique" illustre un (acte d')échange de quantité de
types de « valeur » entre un prêteur et un emprunteur « de marchandise »,
nécessairement individus (cf. ce billet de novembre 2013).
Le taux d’intérêt convenu est un rapport entre l’intérêt et le principal. Sans
(droit de) propriété/principal, pas de prêt/emprunt.
Sans prêt/emprunt de principal, pas de taux d’intérêt.
b. La notion de « prix en monnaie ».
Il y avait enfin la notion de "prix en monnaie" …
La « quantité de ce qu’on dénomme ‘monnaie’ » ne saurait en effet cacher le
"prix en monnaie", autre valeur ou type de « valeur ». Sans « quantité de ce
qu’on dénomme ‘monnaie’ » échangée, pas de prix en monnaie. Le "prix" … en
monnaie était le taux d’échange convenu entre deux parties, individu ou
population, d’une « quantité de ce qu’on dénomme ‘monnaie’ » contre une
quantité de marchandise.
Le caractère « convenu» de l’échange est essentiel, mais trop souvent laissé de
côté.
Le "prix en monnaie" n’était qu’un rapport unitaire convenu de la « quantité de
ce qu’on dénomme ‘monnaie’ » en marchandise par les parties.
A la différence des prix relatifs qui désignent des taux d’échange de
marchandises convenus entre deux individus, les prix en monnaie désignent des
taux d’échange de monnaie contre marchandise convenus entre deux individus ou
deux populations.
Je regretterai que Pareto ait préféré dénommer "prix d'une marchandise en une
autre " le « taux d’échange » (ce taux/rapport de quantités de valeur de
Jevons) car il ne mettait pas ainsi, malheureusement, l’accent sur l’accord
convenu entre les deux parties.
Il laissait de côté sa différence avec le « taux d’échange » qui n’était pas
nécessairement convenu mais seulement attendu.
Les prix en monnaie sont toujours les quantités unitaires de monnaie en
marchandise convenues entre les parties. Quantité unitaire de marchandise et
rapport de deux quantités de marchandises convenus sont deux façons de parler
de la même réalité, à savoir le rapport convenu de la quantité d’une
marchandise ou monnaie et de la quantité d'une autre.
Reste que, quand les accords d'échange ont abouti et sont réalisés, les
échanges convenus sont des quantités de marchandises et de monnaie, et des prix
en monnaie.
L’un d’eux ne saurait être privilégié par rapport aux autres.
5. Les chemins ouverts par la « théorie de la valeur ».
Bref, au total, début XXème siècle, il y avait la « valeur » avec un grand « V
», objet de la « théorie de la valeur », et sa division en tous les types de «
valeur » précédents.
Mais la « théorie de la valeur » ne s’est pas arrêtée à ce stade.
De même qu’on peut considérer qu’elle a été développée, tacitement ou non, par
nos auteurs en parallèle avec des innovations physico-chimiques qui ont vu le
jour à partir du XVIIIème siècle (articulées sur matérialité et durée) et
qu’ils reprenaient,
de même, au XXème siècle, elle l’a été avec des innovations empruntées à
d’autres sciences, a fortiori, ignorées tant de Pareto que de Bastiat
ou de Smith , et très compliquées pour l’homme de la rue.
Je mettrai l'accent sur l'"onde" et sur l'"information".
a. La notion d'"onde".
Conséquences directes des sciences physiques, les notions d’« ondes », d’«
énergie » ou d’« entropie » avaient vu le jour en relation avec la notion de
"mouvement";
« L’onde était transparente, ma commère la carpe y faisait mille tours avec le
brochet son compère »
Qu'est-ce qu'une onde ?
« Une onde est un phénomène physique de propagation d’une perturbation. Sur son
passage, une onde modifie de façon réversible des propriétés locales du milieu
de propagation . une onde transporte de l’énergie sans transporter de matière.
» . fait … sans relation avec ce qui existait ...
https://ecoinfo.cnrs.fr/2015/10/29/comprendre-les-ondes-electromagnetiques/
Conséquences physico-chimiques directes de la notion de « matérialité », des
physico-chimistes les trois « états de la matière » (solide, liquide et
gazeux), qui sont devenus cinq aujourd’hui, au XXIème siècle, avec les notions
de « plasma » et d’« isolant topologique » … substituables.
Dimitri Mendeleiev (1834-1907) a inventé le « tableau périodique des éléments
».
On commençait à être loin de la matérialité et de la durée de
Smith.
Et un domaine de la physique, lui-même controversé au sein des physiciens, est
parvenu à mettre le doigt sur une nouvelle notion, à savoir la notion d’« onde
» (mécanique ondulatoire, électromagnétisme, etc. ).
Depuis le XVIIème siècle et l'étude de la lumière du Soleil, des physiciens
était en opposition avec la notion de « corpuscule », type de « état solide de
la matière », bref de la "matérialité à la Smith".
En particulier, mathématiquement, l"« onde » avait une longueur ou une
fréquence.
Elle était émise et reçue.
La lumière du Soleil était un paquet d’ondes (non conditionné par quoi que ce
soit).
Les sons étaient des ondes (conditionnées par température et pression et non
par la durée ou le temps).
Et les physiciens en sont arrivés au XXème siècle à procéder à la mesure
de l'onde en termes numériques « binaires » et non plus « analogiques » .
Pour leur part, des économistes ont commencé à faire des analogies entre cycle
économique et cycle physique. Ils ont introduit la notion d’onde ou de cycle
économique.
On était loin de la matérialité et de la durée de Smith.
b. La notion d’action humaine.
Il semble possible d’identifier l’onde à l’"action
humaine", généralisation du "travail".
i. La notion abstraite de « travail ».
Selon le raisonnement économique « mainstream », la "valeur travail" (chère à
certains économistes, Ricardo et consorts...) est envisagée, à la fois, de
façon autonome et en relation avec la notion de « service », à l'exemple de
Gérard Debreu (1921-2004) qui n'a pas hésité à écrire dans son ouvrage de 1960
sur la Théorie de la valeur que:
… "Le premier exemple d'un service économique sera le travail humain.
Sa description est celle de la tâche accomplie [...]" (Debreu, 1960)
Il magnifiait ainsi, sans le dire, un résultat d’action humaine ex post… et non
pas une action humaine économique. Implicitement, ce résultat était un type de
« valeur », la "valeur travail", mais n'était pas évoqué en tant que telle dans
la théorie.
ii. La notion abstraite d’ « action humaine ».
Un fait est certain, l’action humaine choisie par l’homme ne saurait être
définie comme la définissait Debreu en 1960, principalement à partir
d’abstractions mathématiques, quand il écrivait :
… « Une action a d’un agent est un point de l’espace des marchandises Rl
[…]
un système de prix p est un point de l’espace des marchandises Rl […]
la valeur d’une action a relative à un système de prix p est le produit
intérieur p.a » (ibid., p.35).
Certes, on peut
faire des abstractions mathématiques, mais une action humaine n’est pas un «
point », un système de prix ne saurait être un « point », la valeur d’une
action humaine n’est pas un « point »… sauf à se situer dans la géométrie de
Riemann (1826-66), seconde géométrie à refuser des postulats de la géométrie
d’Euclide après la première de Lobatchevsky (1792-1856) et Bolyai (1802-60),
ignorée, en particulier, par Smith.
Dans la perspective de Riemann, David Hilbert (1862-1943), autre grand
mathématicien, n’avait pas hésité à soutenir que:
… "[...] les axiomes devaient être tels que si on remplaçait les termes de
'points', 'droites', et 'plans' par 'bière', 'pieds de table' et 'chaises', la
théorie devait toujours tenir. [...]
Il ne fallait pas compter sur l'intuition pour combler les lacunes." (O'Shea,
2007, p.169)
Dans ces conditions, on pourrait remplacer le géomètre par le "piano à
raisonner" imaginé par Stanley Jevons, l'économiste de la « double coïncidence
des besoins »..., avait souligné, pour sa part, par anticipation, Henri
Poincaré (1854 -1912), autre grand mathématicien.
Et ce dernier avait conclu.
"Il y a là une illusion décevante" (Poincaré, 1908, p.4)
Dans ces conditions, on comprend aussi que l’application d’une mathématique à
l’économie politique ou à la science économique, soit, au minimum, source de
confusion.
iii. La notion d’ « action humaine … potentielle ».
Reste que le raisonnement « autrichien » est, pour le moins, flou sur
l’hypothèse de l’« abondance des actions » malgré l’accent qu’il met sur l’«
action humaine »
En vérité, il n’évoque pas l’hypothèse à ma connaissance.
L’être humain a cherché en permanence à changer sa situation économique
insatisfaisante et le coût qu’il lui donnait, par le seul moyen à sa
disposition, à savoir les actions économiques aux résultats de quoi il donnait
également des « valeurs » :
« L'homme qui agit est désireux de substituer un état de choses plus
satisfaisant à un moins satisfaisant» (Mises, 1949/1966, I.2)
iv Abondance des actions humaines potentielles.
Au contraire de l’hypothèse de la « rareté des choses », l’hypothèse de l’«
abondance de quoi que ce soit » implique celle du « choix des quoi que ce soit
» de la part des gens dès lors qu’on fait intervenir des conditions, en
particulier, leur infirmité, leur incapacité de faire comme ils le désirent ou
en ont besoin.
. division du travail.
L’« abondance des actions humaines potentielles » est en définitive une autre
façon de parler de la « division du travail », travail avec un grand « T
».
Il faut rappeler que:
“Adam Smith is the first author who used a concept of the division of labour.
He pointed out that this phrase was not used earlier, except in Mandeville’s
The Fable of the Bees (1729).
Moreover, the first book of his masterpiece An Inquiry into the Nature and
Causes of the Wealth of Nations begins with the following three
chapters:
“Of the Division of Labour,”
“Of the Principle Which Gives Occasion to the Division of Labour,”
“That the Division of Labour is limited by the Extent of the Market.”
His analysis of the division of labour begins with a description of the process
of manufacturing pins.”
La « division » néglige le « travail » pris comme « action humaine », pour le
prendre comme « résultat d’action humaine », comme « service », comme « produit
» ou « facteur de production » (mais « ex post » ou « ex ante
» … d’un pays, d’une nation…, on ne sait…).
. infirmité des gens.
J'aurai tendance à opposer au jugement de valeur qu’est la « rareté des choses»
fondée en définitive sur la psycho(socio)logie des gens (assise sur besoin ou
désir de l’homme) un autre jugement de valeur, à savoir celui de l'"abondance
des actions humaines potentielles" de vous et moi fondée sur une réalité qui ne
saurait cacher la notion d’ « action humaine ».
Dans l’information (conséquence de l’ignorance limitée) où il se trouve et dont
il a conscience, l’homme, infirme de corps et d’esprit, mène des actions, une à
la fois… il doit être spécialisé.
Les actions menées successivement lui sont coûteuses et profitables, elles
donnent lieu à gains ou pertes économiques ex ante, attendus avec incertitude,
puis montrés ex post… aux observateurs.
Et en qualifiant les actions humaines de « potentielles », j’insisterai sur le
point de vue de celui qui parle et j’exclurai qu’il s’agisse de « résultat
d’actions » ex post, ce sont des actions humaines ex ante.
L’« abondance des actions humaines » est plus ou moins parallèle dans son
principe logique à l'« abondance des besoins ou désirs » de chacun, de la
nature humaine, des hommes si ce n’est que l’économiste devrait laisser de côté
la question sauf à vouloir s’immiscer dans les études de la
psycho(socio)logie... Mais cela est un autre problème…
Pour ma part, je dirai que chacun d'entre nous est d’abord confronté à une
multiplicité de travaux… ou d’actions potentiels, pour ne pas dire, comme
semblent l’avancer des économistes, à une division potentielle de l’Action
humaine avec un grand « A », fruit d’une idée a priori de type « holiste », qui
s’offre à chacun…
v. Le raisonnement « autrichien » sur l’ « abondance des actions humaines
potentielles ».
Le raisonnement « autrichien » est, pour le moins, flou sur l’hypothèse de l’«
abondance des actions humaines», a fortiori sur l’hypothèse de l’«
abondance des actions humaines potentielles », malgré l’accent qu’il met sur l’
« action humaine ».
A ma connaissance, il n’évoque pas l’abondance.
Pour les économistes autrichiens, il y a les types de « valeur » que sont les
(droits de) propriétés des gens à valeur d’usage ou d’échange, qui ont été
créés par l’homme et qui sont appliqués.
Ces types de « valeur » attendus avec incertitude résultent des actions, des
opérations menées par les gens, de leur corps et esprit , pour atteindre les
buts qu’ils ont choisi de viser.
L’ « action économique » de l’être humain est ainsi l’axiome de l’« économie
politique autrichienne »:
« L'action est une tentative de substituer un état de choses plus satisfaisant
à un autre état de choses» (Mises, op cit. IV.4)
« L'action est toujours essentiellement l'échange d'un état de choses contre un
autre état de choses » (ibid. X.1)
Disons qu’il semble qu’il soit plus aisé d’envisager l’ « abondance des actions
» dans la perspective de l’« action humaine » ex ante que dans celle
des « résultats de l’action humaine » … ex post.
Disons que la notion d’ « action humaine » est plus qu’un axiome, c’est une
réalité sauf à ce que vous preniez ce que vous faites pour un axiome et soyez
prêts à en prendre un autre (question de coût d’opportunité…), mais où le
prendrez-vous et pourquoi cette substitution ?
Ensuite, l’homme est infirme, il n’a pas en particulier le don d’ubiquité, ni
celui de l’omniscience ou de l’omnipotence…
Il a des incapacités de faire, incapacités juridique, technique ou économique
au nombre de quoi son ignorance sur la réalité est essentielle.
Compte tenu de ce fait de l’infirmité humaine, des incapacités humaines, malgré
l'abondance des actions potentielles qui s’offre à lui, il ne peut mener qu'une
action à la fois.
Ce double fait de l'"abondance des actions potentielles" et de l'"infirmité
humaine" se suffit à soi-même pour comprendre et développer l'économie
politique.
"Pourquoi donc les échanges jouent-ils un si grand rôle dans l’économie sociale
?
Parce que chaque personne ne se consacrant qu’à un seul genre de production, et
une multitude de produits lui étant nécessaires, chaque personne ne consomme
jamais qu’une très-petite partie de ce qu’elle produit, et se trouve forcée de
vendre tout le reste pour acheter la presque totalité des objets dont elle a
besoin. (Say, 1815, p.50)
C’est le problème de la spécialisation de l’action humaine ou, si on préfère,
de l’action unique à la fois.
L’« abondance des actions humaines potentielles » qu’estime l’homme prêt à
mener une action va de pair avec l'« abondance des faits » à quoi se heurte le
savant et dont Poincaré a développé un raisonnement dans un ouvrage intitulé
Science et méthode (1908).
Poincaré a mis l'accent sur l'infirmité, sur la capacité réduite que
connaissait tout savant dans le travail d’étude de faits que celui-ci avait
choisi de mener, étant donné l’ « abondance des faits » qui s’offrait à lui. Et
il en déduisait le fait choisi par le savant.
Seulement ce qu'a écrit Poincaré et qui, pour moi, a donc été une première et
dernière approche de la « théorie microéconomique du savant », est resté lettre
morte. L'accent doit être pris en considération.
La démarche de Poincaré se généralise d’ailleurs sans difficulté pour passer de
l’infirmité du savant confronté à l’« abondance des faits» à l'infirmité, à la
capacité insuffisante de vous ou moi face à l’« abondance des actions humaines
potentielles » .
Avant d’être producteur … ou consommateur comme le veut le raisonnement «
mainstream », l’homme doit être découvreur ou inventeur, bref créateur (même si
on met de côté le « principe des règles de droit »… comme c’est souvent le cas
aujourd’hui et depuis longtemps).
Compte tenu du fait qu’il est infirme, incapable en partie d’agir (en
particulier, qu’il est en partie ignorant, ou d’une rationalité limitée), il ne
peut mener qu'une action à la fois. En conséquence, il doit choisir dans l’ «
abondance des actions humaines potentielles » qu’il juge s’offrir à lui, l’une
d’elles et la mener. Sa vie est ainsi une succession de telles actions
humaines.
Il n’est pas nécessaire, me semble-t-il, de faire intervenir d'autres
hypothèses (et d'insister, par exemple, sur les monopoles de production car
chacun est en situation de monopole), ce double fait de l'"abondance des
actions potentielles" et de l'"infirmité humaine" se suffit à soi-même pour
comprendre et développer l'économie politique.
Quelle règle de choix employer dans l’ « abondance des actions humaines
potentielles » ?
A chacun de le montrer. On ne peut donner une règle a priori, sinon
celle de sa liberté et de sa responsabilité.
6. La notion d’information.
Le nouveau grand type de « valeur » évoqué par des économistes, consciemment ou
non, est la notion d’"information" …
Et le mot « information », après celui de « consommation », a envahi la seconde
moitié du XXème siècle.
Aujourd’hui, et bien qu’il soit ignoré, en grande partie, en tant que tel
depuis le XXème siècle, par les observateurs, un nouveau type de « valeur » a
émergé, c’est la notion d’« information ».
L’« information » est différente, par nature, des types de « valeur » qui
avaient précédé sa transposition de la physique.
Elle a été le fruit de la recherche des physiciens qui, au XIXème siècle, s’est
articulée sur la notion d’« onde », à savoir celui de la notion d’« onde »
créée par les mathématiciens et les physiciens (« mécanique ondulatoire ») à
partir de la seconde moitié du XIXème siècle, notion à émetteur et récepteur de
données… plus ou moins comparable aux notions d’offre et de demande de « valeur
».
Mais il est passé à côté d’une nouvelle notion qui a été créée par ces autres
scientifiques dans leur domaine, qui pointait à l’horizon et à quoi les
économistes médits allaient, eux, porter attention à défaut d’y voir un nouveau
type de « valeur » de la « matière », c’est la notion d’« information ».
La notion d’ « information » ne saurait être classée dans des types de « valeur
» de la « matière » existants comme beaucoup s’y sont adonnés ces dernières
décennies (par exemple, Arrow, Debreu, etc.) et perdus.
L’« information » ne saurait être confondue avec les autres types de « valeur »
avancés ci-dessus comme, par exemple, le « service » (cher à Arrow, 1962, et
ses disciples) déduit directement de Smith , un siècle plus tôt, avec les
notions d’« objets matériels » et de « services » fondés sur la « matérialité »
et la « durée »,
Quitte à la juxtaposer à quelque chose, je considère qu’elle s’est déduite de
la notion d’« action humaine » pour allonger la liste des types de « valeur
».
Il s’agit aujourd’hui
- de la juxtaposer à tous ces types de « valeur » connus,
- voire de faire qu’elle les contienne, et
- non pas de l’enfouir, sans raison, dans certains qui existaient auparavant,
économiquement. .
7. Conclusion.
Le présent texte ne se voulait pas être un article d’ « histoire de la pensée
économique » ou d’« histoire des idées économiques ».
Il a visé seulement à cerner des récifs de la pensée, autant de (types de) «
valeur » dont les économistes du raisonnement « mainstream » de l’économie
politique ont cru pouvoir s’acquitter.
Information et cryptomonnaies sont-elles des « valeurs » à juxtaposer à la
liste des « valeurs » antérieures, celles de la « théorie de la valeur », ou à
expliquer par ces dernières ?
Telle était la question qu’il a posée.
Il a évoqué que sont survenus, à la fin du XIXème siècle, des savants des
sciences physiques qui ont montré que la notion d’onde était indépendante de la
notion d’état de la matière, d’une part, et qui d’autre part, allaient faire
apparaître la notion d’ « information ».
Les physiciens avaient découvert le phénomène naturel d' « onde » et ce qu'elle
implique... à savoir la notion d' « information ».
Tout cela (onde et information) était ignoré par Smith, mais aussi s’oppose à
la matérialité comme l’ont expliqué les physiciens …
Les derniers récifs en date apparus en économie politique que sont les notions
d’ « information » et de « cryptomonnaie » se sont infiltrés dans la « théorie
de la valeur » à partir de la décennie 1930, et ont semblé échapper néanmoins à
tout le monde économique traditionnel.
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