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Hors de la foi, point de salut

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Published : November 24th, 2011
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La calamiteuse émission obligataire allemande a dominé l’actualité de mercredi, témoignant d’une brutale détérioration de la situation. Que les marchés s’en prennent à l’Allemagne illustre l’impasse dans laquelle se trouve la stratégie qu’elle défend. Seuls 3,6 milliards d’euros d’une émission de 6 milliards d’euros à dix ans du Bund ont pu être placés, conduisant la Bundesbank a acheter le solde pour le placer ultérieurement, dans des proportions bien plus importantes qu’elle n’a l’habitude de le faire.


La plus extrême confusion s’est installée. Il y a désormais ceux qui, à Berlin, persistent et signent dans l’affirmation de leur politique mais sont de plus en plus isolés, ceux qui sont trop tardivement favorables à l’émission d’euro-obligations sous conditions, et ceux qui ne voient de salut que dans l’intervention de la BCE. Si les uns et les autres divergent sur la manière de résoudre la crise, tous s’accordent cependant pour considérer que la plus grande rigueur budgétaire est indispensable et affichent leur convergence à ce propos. Et c’est là que le bât blesse.


Malencontreusement, les feuilles de route qui ont été distribuées sont mis en cause par ceux qui sont en charge de les appliquer. Antonis Samaras, leader de la Nouvelle Démocratie, estime que « certaines politiques doivent être modifiées pour garantir la réussite du plan » sur lequel il lui est demandé de s’engager formellement pour débloquer la 6ème tranche du prêt de l’Union européenne et du FMI à la Grèce ; Mario Monti laisse planer le doute sur le retour en 2013 à l’équilibre des finances de l’Italie, en prélude à sa rencontre avec Angela Merkel et Nicolas Sarkozy ; Miguel Arias Cañete, le porte-parole de Mariano Rajoy, demande d’attendre la vérification des comptes publics, avant toute annonce, par crainte de mauvaises surprises comme la droite espagnole en a déjà eu après sa victoire dans les régions. Les gouvernements portugais et irlandais n’ont pas été en reste, le premier pour demander une rallonge, le second une remise de peine.


Porte-parole attitré des mégabanques, l’Institute of International Finance vient d’annoncer que la zone euro était déjà entrée en récession. Ne faisant qu’accroître les déficits budgétaires, fait-il remarquer, critiquant implicitement la stratégie poursuivie par les dirigeants européens et confirmant au passage que les marchés ne croient pas à celle-ci. Dressant un sévère réquisitoire de la gestion de la crise par les autorités européennes, l’IIF préconise l’intervention de la BCE « dans les semaines à venir ».


L’Autorité bancaire européenne (EBA) vient d’apporter un éclairage complémentaire sur l’autre face de la crise, qui monte en puissance bien que cachée. En annonçant que les banques européennes vont devoir en 2012 refinancer 700 milliards d’euros d’obligations émises par leurs soins, qui vont arriver à échéance, elle confirme les difficultés qu’elles rencontrent, qui les conduisent à se tourner davantage vers la BCE pour se financer. À ce propos, la Banque de France a révélé que les banques françaises avaient considérablement accru leurs emprunts à la BCE depuis août dernier, ceux-ci passant de 37,4 à 100,6 milliards d’euros en octobre.


La crise de la dette publique rejaillit sur les banques qui ne parviennent plus à se financer sur le marché interbancaire. Il est donc primordial que le marché obligataire retrouve sa fluidité, expliquent les analystes, rendant indispensable que la crise actuelle soit jugulée. À défaut, les deux se conjuguent. Le système bancaire est sous une assistance respiratoire promise à durer, masquant la réalité de sa situation. Il est également confronté à la nécessité de renforcer ses fonds propres, la détérioration de la situation amenant l’EBA à durcir les stress tests qu’elle mène et à révéler des besoins supplémentaires dans ce domaine. Cela concerne notamment les banques allemandes, dont la Commerzbank. À elle seule, celle-ci verrait ses obligations croître de 5 milliards d’euros, ce qui pourrait l’amener à demander un soutien public, faute de pouvoir les lever sur le marché. Ce dernier est en effet très encombré et de plus en plus jugé à risque, créant une situation très indécise.


Un autre aspect de la crise sous-jacente des banques a été révélé par Citi, la banque américaine, qui contribue à un tableau déjà sombre : les dépôts des banques italiennes, espagnoles et françaises sont en forte diminution. De 10 et 16 % respectivement pour Unicredit et Intesa, 10 et 11 % pour Santander et BBVA, et 6 et 7 % pour BNP Paribas et Société Générale.


La situation des banques espagnoles, dont les 5 principales doivent augmenter leurs fonds propres de 26,16 milliards d’euros, va particulièrement retenir l’attention, en raison des 176 milliards d’euros de crédits problématiques dispensés par les banques dans le secteur de l’immobilier et de l’éclatement continu et difficilement contenu de la bulle correspondant. Ce ne sont pas seulement les Caisses d’Épargne, en pleine restructurations et privatisations difficiles, qui sont touchées : les grandes banques sont également atteintes, même si elles parviennent mieux à absorber ou reporter le choc.


« La faiblesse de l’économie de la zone euro a le potentiel de se diffuser au reste du monde à travers un certain nombre de canaux. L’un des plus immédiats et des plus puissants est le secteur bancaire », a également constaté l’Institute of International Finance, se faisant l’écho des inquiétudes américaines, sans préciser que cette contagion aurait pour principal vecteur les CDS émis par les banques outre-Atlantique, s’ils devaient finir par être activés.


Le mini-sommet réunissant Angela Merkel, Mario Monti et Nicolas Sarkozy s’ouvre aujourd’hui à Strasbourg. Le président français a exalté mercredi « l’amitié et l’alliance entre la France et l’Allemagne », alors que les divergences n’ont jamais été aussi grandes entre les gouvernements des deux pays. En dépit de leur isolement accru, les autorités allemandes ne varient pas, contredisant à nouveau ceux qui croient percevoir ou pouvoir annoncer un infléchissement de leur position : « il faut faire les choses dans l’ordre » a encore réaffirmé mercredi Wolfgang Schäuble, le ministre des finances, exprimant sa conviction « qu’il faut changer les traités et qu’il est possible de le faire dans un délai rapide », et que l’Allemagne sera ensuite prête « à toute la solidarité nécessaire ».


Les marchés en décideront, obéissant à une autre logique ! Le taux des obligations espagnoles et italiennes a continué à se tendre mercredi, atteignant respectivement 6,6 % et 6,8 %.



 

 




Billet rédigé par François Leclerc



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Paul Jorion, sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix dernières années dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié récemment L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain ? (La Découverte : 2007).
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