L’argent flou bénéficie-t-il à la classe ouvrière?

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New World Economics
From the Archives : Originally published June 26th, 2013
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Category : Fundamental

 

 

 

 

Tout au long des 150 années qui viennent de s’écouler, tout particulièrement pour ce qui concerne la sphère politique Américaine, une devise manipulée (ou argent flou) a été favorisée pour satisfaire les intérêts de gauche du parti Démocrate. Un système d’étalon or (ou de monnaie saine) a en revanche été favorisé par les intérêts de droite du parti Républicain.


C’est pourquoi l’argent flou a été avancé comme le meilleur ami de l’ouvrier, dans le même temps que la monnaie saine s’est vue présentée comme la grande favorite des banquiers et de la classe capitaliste – un mécanisme au travers duquel les créanciers avares auraient pu la distribuer aux malheureuses masses. Cette conjecture n’a bien heureusement pas été mise à l’épreuve, puisque les Etats-Unis ont conservé leur monnaie saine jusqu’en 1971.


Cette assertion est-elle correcte ? Lors des élections présidentielles de 1896, les Démocrates réclamaient ce qui reviendrait à une dévaluation du dollar de 50% par le biais de la frappe libre d’argent. La valeur de l’argent avait considérablement chuté par rapport à celle de l’or au début des années 1870 et ce, pour la première fois de l’Histoire. Les Démocrates souhaitaient permettre aux agriculteurs surendettés de rembourser leur dette en argent peu cher plutôt qu’en or.


Cela a débouché sur un discours dont les Etats-Unis se sont longtemps souvenus. William Jennings Bryan, candidat Démocratique aux élections présidentielles, a décrété que de réclamer le remboursement des dettes en or (comme le stipulent les contrats de prêt) ne ferait que crucifier les agriculteurs surendettés.


Avec derrière lui la force de production de sa nation et du reste du monde, avec le support des intérêts commerciaux et des travailleurs, il a répondu à la demande du maintien de l’étalon or en s’écriant ‘ne forcez pas cette couronne d’épines sur le front des travailleurs, ne crucifiez pas la race humaine sur une croix d’or !’.


Mais la force de production n’a pas avalé ses propos. Cette année-là, les électeurs Américains – en majorité des agriculteurs et des ouvriers – ont voté pour McKinley à 51 contre 46% des voix. Peu de temps après, le Gold Standard Act de 1900 a coordonné la loi avec la réalité monétaire en faisant du système monétaire des Etats-Unis un système monométallique, tout comme l’avait fait le Royaume-Uni en 1816.


Il est vrai que dévaluer la devise en 1896 aurait facilité le paiement des dettes. Mais cela aurait également contribué à la diminution du salaire de tous, ainsi que de l’épargne est des actifs financiers. Bien qu’il y ait beaucoup de choses à dire au sujet des effets de la dévaluation d’une devise sur l’économie, il est généralement suffisant de préciser que les travailleurs ne sortent pas enrichis de la diminution de leurs salaires par la dévaluation. ‘Il est impossible de dévaluer son chemin vers la prospérité’, comme on dit.


A l’époque, un membre de la classe capitaliste du nom d’Andrew Carnegie affirmait le contraire: selon lui, une devise saine était la meilleure alliée de l’homme commun, alors qu’une devise flottante offrait un avantage injuste aux spéculateurs et aux hommes des finances.


Rien ne peut placer le fermier, l’ouvrier et toute personne qui ne soit en rien en connexion avec les affaires financières dans une situation plus désavantageuse qu’une monnaie changeante… Dans les moments difficiles, lorsque les prix grimpent et descendent, que la valeur de l’article utilisé comme monnaie fait des acrobaties et que les eaux se troublent, les spéculateurs attentifs saisissent le gros poisson et remplissent leur seau de leurs victimes… Ainsi, les agriculteurs, fermiers et tous ceux qui reçoivent un salaire ou vendent leur production sont ceux à qui bénéficie le plus la fixation de la valeur de ce qu’ils utilisent comme monnaie.


Si vous souhaitez voir ce qui arrive à une société qui traverse de nombreux épisodes de chaos monétaire, observez l’Amérique Latine. Les riches familles d’Amérique Latine ont appris il y a bien longtemps comment gérer les crises périodiques qui ont ravagé cette région du monde au cours du siècle dernier. Elles conservent généralement leurs actifs à l’étranger en période de dévaluation de devises, et les utilisent plus tard pour se procurer des produits domestiques pour peu cher. Le travailleur moyen n’a pas les capacités d’en faire autant, et se retrouve avec un salaire et une épargne dévalués en parallèle à sa devise. Avec le temps, la société tend à bifurquer et à être divisée entre une masse de citoyens pauvres et un petit nombre d’oligarques – ainsi que des multinationales étrangères, notamment des banques, qui viennent remplacer les entreprises locales lorsqu’elles se trouvent au plus bas.


Aujourd’hui, nombreux sont ceux qui pensent que la Grèce devrait quitter la zone Euro et introduire une nouvelle devise dont la seule raison d’être serait apparemment d’être dévaluée. Ces gens, pour la plupart, viennent des Etats-Unis et d’Angleterre, des pays qui ont une histoire de gestion monétaire relativement stable. Pour le peuple Grec, en revanche, la situation est toute autre. Un sondage mené en mai indiquait que 71% des Grecs désirent conserver l’euro, et que seulement 23% d’entre eux voudraient que la drachme soit réintroduite.

 
Un bref coup d’œil à l’histoire de la drachme suffit à expliquer cette opinion. Au début des années 1980, la drachme s’échangeait à hauteur de 50 drachmes par dollar. Lorsque l’euro fut introduit au début de l’année 1999, il fallait 280 drachmes pour acheter un dollar. La valeur de la drachme avait été divisée par six.


Les Grecs savent ce qu’est l’argent flou. Et ils ne l’apprécient pas.


Il arrive souvent que les intentions des avocats de l’argent flou soient bonnes. Ils ne désirent rien de plus que venir en aide à la classe moyenne endettée et sans emploi. Leur problème, c’est le moyen qu’ils utilisent pour y parvenir : la distorsion monétaire des relations économiques. Ils perçoivent souvent les avocats de la monnaie saine comme des avares qui complotent contre les destitués.


A cette attaque, les avocats d’une monnaie saine rétorquent que pour venir en aide aux destitués et à ceux qui se trouvent en difficultés, il faut utiliser d’autres alternatives. Réduisez le poids de leur dette en leur offrant des termes de banqueroute indulgents. Réduisez leurs taxes. Offrez-leur une assistance médicale universelle. Beaucoup de choses peuvent être faites.


Ne touchez pas à la monnaie. Cela ne fait que créer plus de problème que d’en résoudre.

 

 

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Nathan Lewis est l'auteur de Gold: the Once and Future Money, publié par Agora Publishing et J Wiley. Il est le directeur de Kiku Capital Management.
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"C’est pourquoi l’argent flou a été avancé comme le meilleur ami de l’ouvrier, dans le même temps que la monnaie saine s’est vue présentée comme la grande favorite des banquiers et de la classe capitaliste."

C'est exactement l'inverse parce que la monnaie saine préserve l'épargne. Un ouvrier agricole qui aurait épargné une thune par semaine en 1800 aurait légué à ses descendants 52 thunes en 1900, soit à peu près la même valeur. Un de ses descendants qui aurait fait la même chose en 1900 aurait légué en 2000 52 fois 5 centimes de franc lourd, soit à peu près 50 cents d'euro. La monnaie floue, sensible à l'inflation, est bonne pour l'état et la finance mais mauvaise pour les gens et inversement, la monnaie saine, stable, est mauvaise pour l'état et la finance mais bonne pour les gens.
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Si vous souhaitez voir ce qui arrive à une société qui traverse de nombreux épisodes de chaos monétaire, observez l’Amérique Latine.
Les riches familles d’Amérique Latine ont appris il y a bien longtemps comment gérer les crises périodiques qui ont ravagé cette région du monde au cours du siècle dernier. Elles conservent généralement leurs actifs à l’étranger en période de dévaluation de devises, et les utilisent plus tard pour se procurer des produits domestiques pour peu cher.

Réduisez le poids de leur dette en leur offrant des termes de banqueroute indulgents. Réduisez leurs taxes.

Résumé de ce qu le gouvernement fait si bien.
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La crise actuelle est une crise de la monnaie, pas une crise financière comme on veut nous le laisser entendre. Ou tout du moins elle n'est financière que parce que la monnaie n'est plus que de la dette.
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Bien vu. Il y a des règles qu'il ne faut pas transgresser, et parmi celles ci on ne fait pas de la monnaie avec de la dette !
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"C’est pourquoi l’argent flou a été avancé comme le meilleur ami de l’ouvrier, dans le même temps que la monnaie saine s’est vue présentée comme la grande favorite des banquiers et de la classe capitaliste." C'est exactement l'inverse parce que la monna  Read more
Pierre70 - 7/2/2013 at 1:34 PM GMT
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