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La folie de l’Abénomie en un graphique

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Published : November 12th, 2014
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Category : Editorials

Il y a deux domaines dans lesquels l’Abénomie, religion économique démocratiquement élue par le Japon, semble avoir réussi : créer de l’inflation sans augmenter les salaires, et donc diminuer les revenus réels, et dévaluer le yen de 25%, faisant ainsi disparaître un quart de la richesse des Japonais sans le leur dire directement. Le Premier ministre Shinzo Abe mérite toute notre admiration pour ces grands accomplissements.

Mais dans d'autres domaines, ses performances sont assez peu reluisantes. L’un des objectifs de la dévaluation du yen est l’augmentation des exportations rendues moins chères à l’étranger, et la réduction des importations, rendues plus chères pour les consommateurs et les entreprises du pays. Cela permettrait au Japon de relancer son secteur manufacturier et de générer un surplus commercial qui gonflerait le PIB, ferait d’Abe un héros, et sauverait le Japon. C’était le plan.

Mais ce plan n'a pas fonctionné. Ses vicieuses conséquences ont même surpris les plus cynique, dont je fais partie.

Pour ce qui est des exportations, elles s’élevaient en janvier à 5,25 trillions de yens, soit une hausse de 9,5% sur un an. Mais ce n’est hélas que la moitié du taux auquel le yen s’est trouvé dévalué au cours de ces douze derniers mois, et en termes de volumes, les exportations ont donc baissé.

Les importations, qui auraient dû baisser à mesure qu’elles étaient rendues plus chères par un yen dévalué, ont gagné 25% pour passer à 8,04 trillions de yens. Les consommateurs et entreprises du Japon se sont lancés dans une orgie d’achat de produits venus de Chine et d’ailleurs.

le déficit commercial du pays a donc gagné 70,8% pour passer à 2,79 trillions de yens. Le pire déficit commercial jamais enregistré. Presque deux fois celui précédemment qualifié de pire balance commerciale de tous les temps, enregistré en janvier 2013. En janvier 2010, le Japon avait encore un surplus commercial de 43 milliards de yens ! Il s’est agi du dix-neuvième mois consécutif de déficit commercial, la pire séquence depuis que quiconque a commencé à compter, pire encore que la série de quatorze mois enregistrée en 1979-80.

Et ce n’était que la suite d’une détérioration effrénée : le déficit commercial du mois de janvier a été le pire mois de janvier de tous les temps. Il en est allé de même pour décembre, novembre, octobre… et ce jusqu’en 2011.

Mais n’allons pas blâmer la fermeture de réacteurs nucléaires et l’importation de gaz naturel liquéfié et de charbon pour la régénération énergétique. Le Japon est obligé d’importer plus d’énergies fossiles pour combler la perte en énergie nucléaire. La valeur des importations de gaz naturel a augmenté de 21,4% sur un an – ou de 129,8 milliards de yens, en grande partie du fait de la dévaluation de la devise japonaise, et non de l’utilisation accrue de gaz naturel. La valeur des importations de charbon a augmenté de 14,8%, ou de 26,8 milliards de yens. Le total combiné est de 156,6 milliards de yens. Sans cette hausse, le déficit commercial aurait été de 2,63 trillions de yens, plutôt que de 2,79 trillions. Elle n’a donc pas changé grand-chose. Le déficit commercial du Japon aurait avec ou sans elle été le plus élevé de tous les temps.

Et le Japon n’importe pas de gaz naturel et de charbon depuis la Chine, mais c’est toutefois avec la Chine que son déficit commercial a explosé. Malgré les démonstrations d’irritation et d’agression dans les deux pays, le Japon et la Chine sont joints commercialement, et la Chine est le plus gros partenaire commercial du Japon.

Pour aller droit au but concernant les exportations vers la Chine, dont un quart passent par Hong Kong, j’ai combiné les données commerciales de la Chine et de Hong Kong. Les exportations vers les deux pays ont atteint 1,1 trillion de yens, soit une hausse de 8,8% - moins de la moitié du taux de dévaluation du yen ! Mais les importations depuis la Chine et Hong Kong ont augmenté de 34% pour atteindre 1,92 trillion de yens. Fût un temps, le Japon était l’un des pays qui enregistraient les plus importants surplus commerciaux avec la Chine. Mais en janvier, le déficit commercial du japon avec la Chine et Hong Kong a presque doublé pour atteindre 826 milliards de yens.

Où se concentrent les dommages ? L’importation de biens à la consommation, tels que les produits en fer ou en acier, a augmenté de 29% sur un an. L’importation de machines, comme les ordinateurs, a augmenté de 37,4%. Les produits électroniques, dont les semi-conducteurs, les équipements audiovisuels et de télécommunication ont enregistré une hausse de 33,7%. Les équipements de transport ont augmenté de 41%. Les sociétés japonaises dominaient autrefois ces secteurs. Alors que certaines ont été rattrapées par la compétition internationale, d’autres excellent encore pour ce qui est du design de ces produits. Mais elles les fabriquent à l’étranger.

Les sociétés japonaises ont depuis longtemps déplacé leur production à l’étranger pour tirer avantage d’une main d’œuvre peu chère, bien qu’elles restent derrière leurs compétiteurs américains. Depuis le tremblement de terre de mars 2011, elles se sont efforcées de diversifier leurs chaines d’approvisionnement et d’échapper aux contraintes énergétiques, à la hausse des taux et aux coupures de courant qui ont suivi le fiasco de Fukushima. Elles ont déplacé leurs infrastructures de production plus près de leurs plus gros marchés, notamment la Chine, et particulièrement pour ce qui concerne l’industrie automobile.

Elles ont aujourd’hui une raison supplémentaire : traduire les profits de leurs opérations étrangères en yens dévalués ajoute une couche de rouge à lèvre brillant à leurs bilans – et les marchés sont aveuglés par ce genre de sex-appeal illusoire.

Ce que ces héros japonais ne font pas, c’est rapatrier leurs profits étrangers. Ils comprennent l’Abénomie et ne veulent pas voir leurs capitaux démolis par la dévaluation. Ces fonds restent donc à l’étranger, et sont réinvestis à l’étranger, et dépensés à l’étranger. L’économie japonaise a fini par payer. C’est là toute la folie de l’Abénomie.

Bravo, donc, à la Banque du Japon. Sa campagne héroïque d’impression monétaire a porté ses fruits. Les gens n’ont peut-être pas réalisé que leur capital est parti en fumée.

 

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"Les consommateurs et entreprises du Japon se sont lancés dans une orgie d’achat de produits venus de Chine et d’ailleurs."

Ben oui... Même pour le Japonais qui achète principalement japonais... quand les prix montent et que les revenus baissent... un jour ou l'autre il descend en gamme.

En France ça va être difficile car ça fait bien longtemps déjà qu'on est descendu au produit chinois.

Et quand le produit chinois sera renchéri, il ne seront plus payables que les machines Tchadiennes ou Tanzaniennes.
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Tout cela ressemble à un sabotage ordonné, concerté, des plus grandes économies du monde, donc de "l'économie" dans son ensemble...
" En un peu plus d'une heure, sans se faire remarquer, le feu avait eu le temps de ronger par en dessous tout le parterre.
Le plancher de la salle s'effondra d'un coup, révélant brutalement un sinistre déjà trop étendu pour être maîtrisable."

Jean yves Masson: L'INCENDIE DU THEATRE DE WEIMAR.
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Autrement dit, faire payer par les citoyens les erreurs et concussions de leurs dirigeants et élus sans que ces derniers ne soient nullement inquiétés.
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"Les consommateurs et entreprises du Japon se sont lancés dans une orgie d’achat de produits venus de Chine et d’ailleurs." Ben oui... Même pour le Japonais qui achète principalement japonais... quand les prix montent et que les revenus baissent... un j  Read more
Pâris - 11/14/2014 at 12:20 PM GMT
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