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Après plusieurs rebondissements,
Marine Le Pen a réussi à rencontrer
Ron Paul, sauvant quelque peu une tournée américaine assez
désastreuse pour elle.
Il est pour le moins curieux de constater que les
médias français qui ignoraient presque jusqu’à
l’existence du candidat républicain ne mentionnent
aujourd’hui son nom que pour bien mettre en avant sa rencontre avec
Marine Le Pen. En revanche, personne n’avait jamais jugé bon,
jusqu’ici, de s’intéresser à son programme
électoral et ce, alors qu’il est un personnage politique
particulièrement atypique.
Et, surtout, on a relativement passé sous silence
la volonté de Marine Le Pen de rencontrer, dans le même temps,
le pourtant plus médiatique John
McCain, un autre élu républicain
et ex-candidat à la présidentielle de 2008, des élus
démocrates ainsi que l’économiste Joseph
Stiglitz dont les idées sont
opposées à celles de Ron Paul.
Cela montre bien que Marine Le Pen navigue à vue,
déchirée entre plusieurs idées contradictoires, en
dépit de la constance, à travers les décennies, du
programme du Front National. Les mauvaises langues iront même
jusqu’à dire que cette candidate, contrairement à son
père, est définitivement rentrée dans le jeu politique,
ce voyage aux États-Unis traduisant plus sa volonté de glaner
une respectabilité et une carrure internationales que de
réellement chercher de nouvelles solutions à la crise de
l’euro.
Et, en effet, suite à sa rencontre avec Ron Paul,
Marine Le Pen a « tressé les louanges » de
l’étalon-or, expliquant, à très juste titre, qu’il
permettrait d’éviter la spéculation. Or, un tel
système ne saurait convenir au Front National et à son coûteux
programme : l’étalon-or impose une discipline
empêchant des dépenses publiques immodérées. La
monnaie a une valeur indexée sur l’or et il est donc difficile pour
les gouvernants d’en manipuler la valeur. Il est donc inconcevable de
retourner au système de l’étalon-or et, dans le
même temps, de procéder à une dévaluation
du franc comme souhaite le faire Le Pen.
Ce n’est pas un hasard si le président Nixon
attendit de broyer complètement les derniers restes –
déjà bien déchiquetés – de la
convertibilité monnaie/or, pour ensuite procéder à une
substantielle dévaluation
du dollar. Et encore, celle-ci ne s’éleva
« qu’à » 8% alors que la présidente
du FN, bien plus « ambitieuse », parle d’une
dévaluation du nouveau franc de l’ordre de 20%...
Il est, de ce fait, illusoire de croire que Le Pen et Ron
Paul ont des points communs politiques, d’autant que, comme
l’indique l’article du JDD mis en lien, la candidate du Front
National reconnaît, dans un accès de sincérité,
que, sur l’échiquier politique américain, elle serait
classée « très à gauche ». Mais
cela n’empêchera jamais quelques médias isolés, en
quête d’analyses capillotractées,
d’essayer d’établir des convergences entre ces deux
personnages.
Cet
article-ci, sans tomber dans la caricature, se distingue toutefois par
quelques inexactitudes et raccourcis : outre le fait que le Tea Party n’est pas un mouvement libertaire mais
libéral, l’auteur, Tomas Poyen,
explique que Ron Paul et Le Pen dénoncent, tous les deux, le fiscalisme dans lequel leurs deux pays sont
embourbés. À la différence que, dans le programme du
Front National, la dénonciation du fiscalisme
n’est qu’un slogan et que l’augmentation des
dépenses publiques, à laquelle Marine Le Pen veut
procéder si elle est élue à la présidence de la
République française, rendrait impossible la baisse des taux
d’imposition et le relâchement du poids fiscal pesant sur les
citoyens français.
Il est toujours facile et démagogique de proposer
une baisse d’impôts mais, pour cela, il faut aussi avoir le
courage politique de mettre en œuvre une telle ambition. Ron Paul
l’a, comme on l’explique dans cet
article du CATO Institute traduit par le webzine, Contrepoints. Advenant l’élection de Ron Paul
à la présidence, plusieurs ministères-phares seraient
ainsi supprimés. De même, les dépenses publiques –
et, notamment, les dépenses militaires – subiraient une baisse
importante. Enfin, certaines autorités administratives
bureaucratiques, comme l’autorité fédérale du
transport aérien, seraient privatisées.
Le Front National a souvent été loué
pour sa sincérité et sa constance politiques. Mais de telles
valeurs morales impliquent de proposer, en conséquence, un programme
réaliste. Tel n’est pas le cas du parti d’extrême
droite français qui aurait des leçons à tirer de Ron
Paul en la matière.
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