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Les enchères sont ouvertes

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Published : June 22nd, 2011
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Category : Editorials

 

 

 

 

Après avoir raccroché leurs téléphones, les financiers du G7 se sont rappelés l’autre soir, a révélé à Reuters le ministre canadien… Qu’avaient-ils oublié de se dire ? L’hypothèse est qu’ils ont voulu mieux prendre la mesure des conséquences d’un défaut grec, ce qui montrerait – si cela est exact – avec quelle confiance en leur capacité de résoudre la crise ils abordent les jours et semaines qui viennent.


Un bras de fer se poursuit en vue d’obliger les parlementaires grecs à voter le nouveau plan de rigueur, afin qu’une tranche du prêt déjà décidé soit versée. Les banques, et d’une manière générale les créditeurs privés de la dette grecque sont mieux traités, puisqu’il n’est question que de leur participation volontaire pour la suite des opérations.


Pour marquer le coup, l’idée un instant évoquée de ne débloquer que partiellement la tranche n’a pas été adoptée, et tout a été renvoyé au 3 juillet prochain, à l’occasion d’une nouvelle réunion extraordinaire de l’Eurogroupe. Une nouvelle mission impromptue de la Troïka a été envoyée à Athènes, le jour même où le Parlement doit voter, afin de symboliser la vigilance européenne alors que des manifestations sont prévues devant le Parlement. Enfin, les plus fortes pressions sont exercées sur le président de Nouvelle Démocratie pour qu’il s’associe positivement au processus. La date du 3 juillet a été finement choisie afin de pouvoir dans les temps verser les fonds, afin d’éviter le défaut : selon une note des finances grecques, les besoins financiers seront couverts jusqu’au 18 juillet, cela laisse 15 jours pour l’ordonnancement du virement si les fonds sont disponibles  !


Sur le second terrain, la situation connaît un prévisible et singulier renversement. Via leur organisations professionnelles respectives, BdB et VöV, les banques allemandes privées et publiques ont commencé à faire savoir leurs revendications. Puisque leur concours est demandé, il va falloir le payer, disent-elles sans ambages. Différentes suggestions émergent, soit qu’elles bénéficient de la garantie de l’Etat quand elles souscriront à de nouvelles obligations grecques, les leurs arrivant à maturité, soit que les nouvelles obligations soient assorties d’un coupon plus avantageux… Dans le premier cas, cela reviendrait à ce que tout le fardeau du nouveau plan de sauvetage repose sur l’Etat, dans l’autre qu’un coût supplémentaire serait imposé aux Grecs, chargeant encore le plateau de la balance.


Quand aux banques françaises, elles ne s’expriment pas publiquement, muettes par constitution.


Wolfgang Schaüble, le ministre allemand des finances, n’a pas attendu pour déclarer que de telles incitations n’étaient pas nécessaires, « tout le monde ayant intérêt au développement stable de la Grèce », mais il ne fallait pas accepter de se placer dans cette position de demandeur vis à vis des banques… Leur participation volontaire va être durement monnayée et la rendre absurde à l’arrivée. Les créanciers n’ignorent pas, en effet, ce qui les attend au bout du chemin : une décote en bonne et due forme.


Il en a été pourtant été tenu compte autrement par les ministres, qui le savent également. Une décision prise durant leur longue réunion nocturne de 7 heures de dimanche à lundi aurait pu passer inaperçue, et cela aurait été bien dommage. Le futur Mécanisme Européen de Stabilité (MES), qui verra le jour en 2013 après adoption d’un amendement au Traité de Lisbonne sur lequel les ministres se sont mis d’accord, n’aura pas le statut de créancier privilégié, ce qui signifie qu’il sera placé au même rang que les créanciers privés en cas de problème.


Cette modification aux conditions initialement envisagées est présentée comme devant faciliter le retour sur le marché des pays bénéficiant des prêts du MES. Elle prélude en réalité au partage des pertes qui devront être constatées un jour ou l’autre. Nos ministres voient loin, quand il s’agit de faire des cadeaux.


Ils tendent aussi le cou pour tenter d’apercevoir, non plus les jeunes pousses de la reprise, comme dans l’épisode précédent, mais les signes avant-coureurs de l’extension de la zone des tempêtes à de nouveaux pays. Une compétition d’un genre nouveau est à ce propos engagée, pour savoir qui de l’Espagne ou de l’Italie y entrera en premier. Les inconvénients des deux solutions sont soupesées, ayant en commun de rendre obsolète le mécanisme sur lequel repose ce MES qui n’est pas encore opérationnel. Les besoins financiers correspondant au sauvetage de chacun de ces deux pays ne seraient pas dans ses moyens et imposeraient l’adoption d’un nouveau mécanisme financier.


Sous les auspices de la BCE et de Jean-Claude Trichet, le débat sur la relance de l’intégration européenne est parti sur les bases étriquées, inconvenantes et économiquement injouables d’un renforcement de la discipline budgétaire. De timides tentatives apparaissent ici ou là pour essayer de le déplacer au moins partiellement sur un autre terrain.


Didier Reynders, le ministre belge des finances, a apporté sa pierre en déclarant « on a une banque européenne mais on n’a pas vraiment de politique budgétaire et ça, c’est ce qui nous manque ». Guy Verhofstadt, ex-Premier ministre de la Belgique, a expliqué que « chaque jour rend plus urgent le passage à une étape supérieure avec notamment la création d’un grand marché obligataire unique pour les dettes publiques des Etats » (impliquant la création d’euro-obligations).


Les socialistes allemands et français se réveillent de leur côté, Sigmar Gabriel et Martine Aubry co-signant un article dans la Frankfurter Allgemeine. Ils reprennent leur proposition de taxe sur les transactions financières, l’inscrivant dans la perspective d’une politique fiscale européenne commune, et l’assortissent d’un plan destiné à renforcer les pays les plus faibles. Enfin, ils estiment à la fois nécessaire la création d’euro-obligations et la participation des créanciers privés à l’effort.


Venant de représentants de partis pouvant prétendre accéder aux affaires (comme ils disent) dans les deux pays piliers de la zone euro et de l’Union européenne, cette prise de position pourrait amorcer une réflexion, une fois sorti des généralités et entré dans le vif du concret. Mais il y a loin de la coupe aux lèvres avec les partis de gouvernement, comme l’on sait.


L’agence Fitch vient d’apporter sa contribution au très délicat exercice d’équilibre que les dirigeants européens ont engagé, mettant à son tour en garde à propos de tout ce qui pourrait être de près ou de loin considéré comme un événement de crédit, apportant de l’eau au moulin de banques déjà portées à la surenchère. Les négociations ne sont pas gagnées d’avance, les ministres ont eu raison de se repasser un deuxième coup de fil.


Billet rédigé par François Leclerc


Paul Jorion




(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.   

 

 

 

 

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Paul Jorion, sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix dernières années dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié récemment L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain ? (La Découverte : 2007).
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La Grèce au bord du précipice

La Grèce, le patient le plus mal en point de la zone euro, semble proche de l’inévitable. La majorité des financiers, des banquiers et des économistes est convaincue qu'Athènes ne pourra plus éviter le défaut de paiement. Peu importe le degré (défaut technique ou insolvabilité totale), mais la Grèce n’est plus en mesure de rembourser ses dettes...

http://www.news-26.com/econmie/699-la-grece-au-bord-du-precipice.html
Bon article en effet.

Mais doit on parler de faillite de la Grece ou de faillite de l'Euro,ou de faillite des bureaucrates imbéciles qui ont permis à ce pays de s'endetter sans limites à des taux auquels ils n'auraient jamais eu la possibilité de rêver, des politiciens batisseurs d'empire qui ont cru possible la construction dette tour de Babel Européenne, ou des banques stupides qui ont ouvert leurs guichets à des gens qu'elles savaient non solvables ?

Ou de tout à la fois ?
Je dirais. de tout à la fois !
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Gilles Morandi - 6/23/2011 at 11:59 AM GMT
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