In the same category

Recension de Le droit et les droits de l’homme de Michel Villey

IMG Auteur
 
Published : February 07th, 2014
658 words - Reading time : 1 - 2 minutes
( 2 votes, 3/5 ) , 1 commentary
Print article
  Article Comments Comment this article Rating All Articles  
0
Send
1
comment
Our Newsletter...
Category : Editorials

 

 

 

 

1914 n’aura pas uniquement accouché de ce grand malheur pour l’humanité qu’a été la Première Guerre mondiale. Des grands hommes ont également vu le jour durant cette année (Sisowath Sirik Matak, Louis de Funès, etc).


Nous pourrions également ajouter un des plus prolifiques philosophes français du XXème siècle : Michel Villey.


À l’occasion du centenaire de sa naissance (rappelons qu’il s’est éteint il y a près de vingt-six ans), il m’est venu l’envie de relire un de ses opus phares, Le droit et les droits de l’homme. Petit ouvrage, en apparence, mais assez dense dans le contenu.


Cet ouvrage a suscité les vociférations de nombre de ses collègues car Michel Villey ne fit ni plus ni moins que s’attaquer à une « vache sacrée » de l’ère contemporaine : les droits de l’homme. Pour mettre les points sur les « i », il va de soi que Villey n’est pas un partisan de l’autoritarisme et critique seulement la manière, souvent inconsistante, dont les penseurs modernes défendent les droits de l’homme.


Il est vrai qu’aujourd’hui (et il est sans doute dommage que Villey ne consacre pas plus de lignes à l’ère contemporaine), les droits de l’homme sont devenus un concept « fourre-tout » et illisible. En témoignent ces nombreuses « générations de droits » qui reflètent, chacune, l’idéologie dominante du moment. Les droits de la première génération ont été adoptés durant l’ère libérale. Ceux de la deuxième génération l’ont été durant la domination des idées socialistes. Plus récemment, des droits « contemporains » ont également vu le jour (droits environnementaux, droit au développement, droit à la paix, droit à la différence, droit des minorités, etc). Plusieurs de ces droits « récents » entreront nécessairement en collision avec les droits de la première génération. Preuve que les droits de l’homme sont un concept aisément récupérable, y compris par des États totalitaires, comme l’U.R.S.S. stalinienne. Le droit perd ainsi de son éclat et devient subjectif.


Dans son petit opus, Michel Villey nous fait ainsi remonter le temps jusqu’à l’ère antique et, notamment à la période gréco-romaine. L’auteur rappelle la dette intellectuelle que nous devons à Aristote et à plusieurs penseurs romains, comme Gaius. Il modère également les clichés sur l’esclavage à Rome, démontrant que si, effectivement, les esclaves ne disposaient pas des mêmes droits que leurs propriétaires, ces derniers ne pouvaient avoir un « droit de vie et de mort » sur lesdits esclaves.


En outre, c’est principalement à partir du IIIème siècle avant Jésus-Christ que le statut des esclaves s’est apparenté à celui de « chose », preuve que la construction d’un empire aux frontières toujours plus extensibles débouche nécessairement sur une violation des droits de l’homme.


Villey s’intéresse également à l’ère catholique. Il est un profond admirateur de Saint Thomas d’Aquin, lequel eut surtout le mérite de se référer à la tradition juridique romaine sans tenter de la modifier. Certains penseurs catholiques, comme Jean Duns Scot et Guillaume d’Ockham, n’eurent pas les mêmes scrupules méthodologiques et développèrent la doctrine du nominalisme, créée au XIème siècle par Roscelin de Compiègne. Le nominalisme eut de profonds effets sur le droit, introduisant un individualisme forcené. Sous Rome, notamment, le droit tenait compte des aspects sociaux et du fait que l’individu n’était pas isolé. Le nominalisme introduisit une nouvelle ère.


Quelques siècles plus tard, Hobbes s’inspirera des thèses de Guillaume d’Ockham. Hobbes construira son État moderne et tout-puissant sur le fondement des libertés individuelles… Plus tard, John Locke reprendra également les idées d’Hobbes mais pour mieux les adapter à la « sauce libérale ».


Villey, dans cet ouvrage, s’indignera principalement de la récupération idéologique du droit par ces auteurs qui ont participé à sa construction alors qu’ils n’étaient pas eux-mêmes des juristes.


Il déplorera aussi le fait que les universités de droit tendent à devenir aujourd’hui des universités de sciences sociales.


L’impérialisme de certaines disciplines a ainsi envahi lesdites universités et, selon lui, il faut rechercher, dans cette confusion, le déclin du droit.

 

 

<< Previous article
Rate : Average note :3 (2 votes)
>> Next article
Ronny Ktorza, diplômé de l'IEP d'Aix-en-Provence et d'HEC, est avocat depuis janvier 2011
Comments closed
  All Favorites Best Rated  
"la récupération idéologique du droit par ces auteurs qui ont participé à sa construction alors qu’ils n’étaient pas eux-mêmes des juristes.
Il déplorera aussi le fait que les universités de droit tendent à devenir aujourd’hui des universités de sciences sociales."
Tout un programme !
Il serait d'ailleurs bon à notre époque de redéfinir "la France terre d'asile et des droits de l'Homme".... Nous sommes sur une pente sacrément savonneuse !
S'il y en a qui ont des infos sur l'Ecole Nationale de la Magistrature où sont formés nos 'justiciers", je suis preneur !
Parce que des pros du droit et de la justice qui défendent bec et ongles leur indépendance tout en étant eux mêmes affiliés à des partis ou syndicats de gauche et qui ont créé le "mur des cons", moi, ça me laisse plus que perplexe...


Rate :   3  0Rating :   3
EmailPermalink
Latest comment posted for this article
"la récupération idéologique du droit par ces auteurs qui ont participé à sa construction alors qu’ils n’étaient pas eux-mêmes des juristes. Il déplorera aussi le fait que les universités de droit tendent à devenir aujourd’hui des universités de sciences  Read more
merisier - 2/7/2014 at 9:03 AM GMT
Rating :  3  0
Top articles
World PM Newsflow
ALL
GOLD
SILVER
PGM & DIAMONDS
OIL & GAS
OTHER METALS