"Les machines ne devraient faire que ce que les humains sont incapables de faire", il suffit d'ajouter un seul mot à la fin : "compétitivement", et tout sera dit.
J'ai vu un documentaire sur la chaîne de magasins néerlandais Hema. Elle vend des articles d'intérieur à bas prix, mais place ses magasins dans des endroits prisés. Alors, comment payer le loyer élevé en vendant des assiettes à un euro ? En magasin, deux points clés : 1) Faire acheter de la camelote inutile aux gens. Les articles sont "amusants" et tellement pas cher, que l'instinct d'accumulation des individus est titillé, alors ils prennent ce "qui pourrait peut-être servir". (Ikea fait pareil, la vente des gros meubles en kit avec marge bénéficiaire infime ne lui rapporte pas grand chose, il fonctionne surtout avec la vente de camelote décorative inutile). 2) Réduire au strict minimum l'espace de stockage. Le stock se trouve en rayons.
Mais comment implémenter ce point deux ? Hema utilise un système de flux tendu. Dès qu'un article passe à la caisse, l'entrepôt central reçoit automatiquement une information. C'est dans cet entrepôt central que tout se joue : un ordinateur calcule en permanence les besoins de chaque point de vente, il génère des commandes, sort les produits, les fait assembler et les expédie le plus vite possible. Un point devrait interpeller : "les fait assembler". En effet, la machine n'est pas capable d'assembler elle-même ces commandes, du moins pas sous une forme rentable. Alors ce sont des employés humains qui assemblent les commandes, au service de l'ordinateur. Car oui, chaque employé y porte un casque audio et reçoit des ordres de l'ordinateur. Chez Hema, l'homme travaille au service de la machine, en attendant qu'on invente une machine capable de remplacer ces derniers ouvriers.
Concernant les 100 millions d'emplois, tout est dans ce qui n'a pas été dit. C'est facile de créer des millions d'emplois de très bas niveau, où les humains remplissent des boîtes au service d'un ordinateur, ou pédalent dans les gaz d'échappement pour livrer un repas à domicile. Il y aura beaucoup d'emplois éreintants, sous-qualifiés, sans évolution possible, et surtout, éphémères. Avec l'uberisation de la société, il n'y a plus d'entreprise. Il y a juste du capital qui se déplace. Le capital trouve un secteur, il y créé des milliers/millions d'emplois comme ceux décrits ci-dessus, presse le citron, et puis se déplace vers un secteur, laissant derrière lui des milliers/millions de gens qui se sont épuisé pour rien, si ce n'est survivre un an de plus. C'est l'entreprise dématérialisée, et n'en déplaise à certains, Jacques Attali l'avait prédit dans "une brève histoire de l'avenir". C'est l'hyperempire, où les entreprises sont des sortes de "cirques" en tournée permanente, s'installant temporairement là où les conditions sont intéressantes avant de se déplacer ailleurs, sans se soucier de ce qu'elles laissent derrière elles. (voyez les reportages sur les infrastructures olympiques). Commented 2743 days ago |