Il
y a des jours où la brièveté s’impose : des
deux côtés de l’Atlantique, il y a blocage
sévère ! Aux États-Unis et en Europe, la crise des
dettes publique et privée confondues ne trouve aucune solution et
menace de dégénérer. Tout donne
le sentiment de pouvoir basculer.
Symboles
de cette double situation d’impuissance, la Fed américaine vient
de conclure deux jours de réunion en avouant ne pas comprendre ce qui
se passe – et en restant l’arme au pied – tandis que les
chefs d’État et de gouvernement européens se
réunissent ce soir en sommet, ayant prévu… de ne rien
décider de tangible à propos du sauvetage financier de la
Grèce, en dépit des alarmes américaine et chinoise qui
les pressent.
Qualifiée
d’attentisme cette véritable paralysie n’a rien de
surprenant, elle témoigne de l’incapacité des
autorités en charge d’opérer les mises en cause qui
seules leur permettraient d’agir.
Dans
ce contexte pesant, un rapport du bureau du budget du Congrès
américain vient de donner un éclairage, prévoyant une
explosion de la dette publique, passée de 40 % du PIB en 2008 à
70 % cette année, les projections lui faisant atteindre le chiffre de
200 % vers 2035 si rien n’est fait. On conçoit
qu’empêcher cette évolution demande de prendre des
décisions radicales, mais lesquelles ? Cette fois-ci, c’est
bien la fin du rêve américain qui est en tout état de
cause enclenchée.
Il
a fallu à la Fed deux jours de réunion de son comité de
politique monétaire pour décider de ne pas bouger. Prise, comme
sa collègue britannique qui vient également de tenir une
réunion avec le même effet, entre des signes inflationnistes et
une détérioration des prévisions de croissance et du
chômage. Et pour cause : ni ses injections de liquidités ni
le maintien de son taux directeur au plus bas n’y font quoi que ce
soit. « Nous sommes préparés à prendre des
mesures supplémentaires, manifestement, si les conditions le
justifient » a été le seul commentaire un tant soi peu concret de Ben Bernanke,
le président de la Fed, qui a reconnu « ne pas avoir de
lecture précise des raisons pour lesquelles ce rythme ralenti de
croissance persiste », une manière de reconnaître que
ses outils conceptuels sont aussi inopérants que ne l’est sa
panoplie d’outils.
Ce
n’est pas plus brillant du côté européen, si
l’on un croit un nouveau cri d’alarme
de Jean-Claude Trichet. Tandis que les agences de notation annoncent
qu’elles vont scruter à la loupe les conditions dans lesquelles
les banques pourraient participer au sauvetage financier grec, afin de conclure
un défaut sur la dette au plus petit soupçon, ces
dernières font entendre un silence assourdissant, après avoir
réclamé de généreuses compensations. L’initiative
de Vienne dont se prévalent les dirigeants politiques tend
à se réduire une fois de plus à des mots.
« La
plus sérieuse menace qui pèse sur la stabilité
financière dans l’Union européenne vient de
l’interaction entre les vulnérabilités des finances
publiques de certains États membres et le système bancaire,
avec des effets de contagion potentiels dans l’Union et
au-delà » a déclaré Jean-Claude Trichet, au
nom du Comité des risques systémiques dont il est le
président. L’inquiétude pointe après les menaces,
l’amenant à entrer dans le vif du sujet de la situation des
banques.
Tardivement
mais non sans à-propos, le régulateur européen
suprême des banques, l’EBA (European Banking Authority), vient de
demander aux 90 banques pour lesquelles des stress tests sont en cours de
remettre leur ouvrage sur le métier et d’inclure de
manière impromptue dans leurs simulations
l’éventualité d’une décote de 36% sur la
dette grecque.
Devant
l’imminence du danger, une réunion a été
improvisée avant le sommet européen, regroupant outre Angela Merkel et Nicolas Sarkozy, Jean-Claude Trichet, George
Papandréou, Jean-claude Juncker, Herman Van Rompuy et José Manuel Barroso. A part
réaffirmer sous une forme dramatisée de grands principes dont
toute la difficulté réside dans leur mise en musique, on ne
voit pas très bien ce qu’ils vont pouvoir décider.
Ils
ne peuvent au mieux que boucher les trous financiers immédiats de la
Grèce pour convaincre le FMI, qui se fait tirer l’oreille, de
faire de même. Ils en sont là, à régler les
problèmes à la petite semaine.
Billet
rédigé par François Leclerc
Paul Jorion
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