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Du déjà vu et revu

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Published : August 03rd, 2011
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Category : Editorials

 

 

 

 

Les alertes se succèdent, sans aucun répit. A peine une crise dénouée, elle rebondit. L’Europe vient de prendre le relais des Etats-Unis, où la tension n’est qu’en partie retombée et se prépare à rebondir, quand il va falloir à nouveau entrer dans le vif du sujet et rendre crédible le retour dans une spirale ascendante de l’économie américaine.


En Europe, on croyait depuis deux jours revoir un film déjà vu : les taux obligataires se tendaient brutalement et atteignaient des niveaux historiques, les spreads qui mesurent le différentiel de prime de risque avec l’Allemagne grimpaient, ainsi que le coût des credit defaut swaps (CDS), ceux de la France suivant la tendance.


Sauf que, cette fois-ci, il s’agit de l’Italie et de l’Espagne, respectivement troisième et quatrième puissance économique de la zone euro. Les digues mises en place ne contiendront pas ce qui se présente. Dans l’immédiat, les marchés tremblent et Moody’s vient d’abaisser à « négative » la perspective de sa note Aaa qu’elle maintient pour les Etats-Unis.


Le film se poursuivait ensuite à l’identique : Giulio Tremonti, ministre des finances italien, convoquait dans l’urgence une réunion du comité pour la sauvegarde de la stabilité financière, réunissant la Banque d’Italie, l’autorité boursière et le régulateur des assurances. Il s’entretenait avec le commissaire Oli Rehn avant de rencontrer demain mercredi le chef de file de l’Eurogroupe, Jean-Claude Juncker. José Luis Rodriguez Zapatero retardait de son côté ses vacances.


Une rumeur insistante du marché faisait état d’une décision imminente de dispenser l’Espagne et l’Italie de leur participation financière au sauvetage de la Grèce, amenant la commission à démentir, en précisant qu’il y avait un « mécanisme spécial » pour contrebalancer le surenchérissement du crédit que ces pays subissaient sur le marché. Ce qui n’était pas pour rassurer.


De Bruxelles, la commission affirmait qu’« aucun plan de sauvetage » n’était sur la table pour l’Espagne et l’Italie (ni pour Chypre non plus). Jugeant « risible » le coût des CDS sur la dette italienne et espagnole, Herman Van Rompuy, président de l’Union européenne, déclarait enfin dans une tribune publiée par Le Monde que « On ne soulignera jamais assez que la situation de la Grèce est unique, et qu’elle n’est pas comparable à celles d’autres pays de la zone euro ».


Oubliées dans la bataille, les bourses européennes chutaient, les analystes ne sachant pas à quoi l’attribuer : le scepticisme croissant sur la portée de l’accord voté au Congrès, les dernières données corrigées sur une croissance américaine plus qu’anémique, ou les chiffres toujours en baisse de la consommation intérieure. Ou bien encore le nouvel épisode de la crise européenne, qui s’enclenche le précédent même pas terminé.


Alors que tous les commentaires, après n’avoir cessé de se focaliser sur la dette publique , découvraient que celle-ci serait très difficilement résorbée des deux côtés de l’Atlantique sans croissance économique, l’OCDE publiait l’un de ses inimitables rapports ne pouvant que mettre de l’huile sur le feu.


Constatant que la récession grecque s’accentue par rapport à ses propres prévisions, et que le chômage continue d’exploser, elle recommande sans faillir l’application « irréprochable » des réformes engagées, en expliquant que « l’austérité va avoir des résultats à long terme », puisqu’elles visent à remédier « aux causes profondes de la crise, et non à ses symptômes ». Sur la base de ses hypothèses, enfin, l’OCDE estime que « le ratio dette/produit intérieur pourrait atteindre un sommet en 2013, avant de retomber en-dessous de 60% au cours des deux prochaines décennies ». Elle dévoile ainsi la durée de la peine à laquelle sont condamnés les Grecs : vingt ans de pénitencier. Sera-t-elle moins lourde pour les autres ?


Cerise sur le gâteau, l’organisation précise que la bonne volonté du gouvernement grec sera notamment mesurée à l’absence de « mesures protectionnistes » envers des partenariats ou regroupement des banques grecques avec des banques européennes. Il ne s’agit donc pas seulement d’un programme de privatisations de 50 milliards d’euros à réaliser dans les cinq ans à venir.


Du côté des banques, Baudoin Prot, administrateur général de BNP Paribas, a également exposé sa vision de l’avenir, qui a en commun avec la précédente d’être totalement irréaliste. Relevant que la participation de sa banque au plan de sauvetage de la Grèce allait coûter un demi-milliard d’euros à sa banque, il insiste sur le fait que cette charge exceptionnelle vaudra « solde de tout compte en ce qui concerne les investisseurs privés », rappelant combien les chefs d’Etat et de gouvernement avaient été lors de leur sommet « extrêmement clairs » à ce sujet. Pendant ce temps-là, ses plus proches collaborateurs doivent être en train de vérifier l’exposition de BNP Paribas à l’Espagne et l’Italie…


La simultanéité des crises américaine ou européenne crée une nouvelle spirale descendante. Aux inquiétudes à propos du niveau de la dette publique se superposent désormais celles sur le danger d’une récession atteignant toute l’économie occidentale. Le FMI vient d’y contribuer en écrivant dans son rapport annuel sur le Royaume-Uni que « les perspectives de croissance sont sujettes à des incertitudes considérables ».


« L’économie avance nettement moins vite que nous ne pensions » vient de reconnaître Timothy Geithner, secrétaire d’Etat américain au Trésor. Pour vite ajouter que « cela se produit dans le monde entier » dans l’intention de le minimiser, tout en estimant que le risque d’une nouvelle récession n’était pas « très important ». Pour admettre, enfin, que l’emploi ne s’améliorait pas, signe selon lui que « les entreprises ont énormément mis l’accent sur l’amélioration de la productivité ».


Sont-ils tous à ce point inconscients ou simplement des affabulateurs ? L’un n’empêche pas l’autre.




Billet rédigé par François Leclerc




Paul Jorion






(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.   

 

 

 

 

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Paul Jorion, sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix dernières années dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié récemment L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain ? (La Découverte : 2007).
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