Le mois de juin s’achève et cette période favorise un petit bilan d’étape, avant la trêve estivale et la reprise du rythme frénétique de l’actualité dès septembre. Et faire le point pour savoir où l’on se trouve maintenant est d’autant plus nécessaire que les directions prises par le pays sont peu claires et qu’il est donc difficile de savoir où l’on va.
Un constat s’impose déjà : où qu’on regarde, la situation s’est, très globalement, dégradé.
Au plan économique bien sûr, l’ambiance générale n’était pas franchement rose il y a un an. Rien dans ce qui s’est passé ensuite n’a permis à la croissance de réapparaître. Les différents secteurs (immobilier, énergie, transport, tourisme, manufactures ou industries diverses) n’affichaient pas de brillantes perspectives, et les mois qui se sont écoulés n’ont que rarement amené de bonnes nouvelles sur ces fronts-là. L’emploi, par exemple, continue d’afficher sa faiblesse avec un chômage au plus haut depuis des décennies.
Au plan politique, il y a une petite année, le parti officiellement socialiste pataugeait quelque peu dans une conjoncture défavorable, et le parti d’en face, officieusement aussi socialiste mais estampillé à droite pour des raisons historiques et de commodités, ne manquait pas de faire rire un peu tout le monde avec ses querelles intestines et son indécision pour se trouver un chef et paraître un minimum rassemblée dans le combat d’opposition qu’on s’attendait à lui voir mener. Là encore, deux poignées de mois plus tard permettent d’afficher un marasme encore plus grand qui ne semble avoir profité ni à l’un, ni à l’autre.
Et c’est ce constat qui me paraît d’importance.
À gauche, le Parti Socialiste s’est mangé deux belles branlées électorales de magnitude 9. Ce n’était ni totalement fortuit, ni totalement surprenant compte tenu de la dégelée cadencée que les Français en général et les contribuables en particulier se sont prise. Mais ces volées démocratiques cinglantes n’expliquent pas tout, et notamment pas tout ce qui se passe en ce moment.
On assiste en effet à ce qui pourrait être comme un renoncement progressif, à une sorte de marche arrière désordonnée, mal ou pas assumée, hésitante et brouillonne. Progressivement, il semble qu’on modifie la portée, qu’on réduit la voilure, qu’on rabote les réformes, qui se sont contentés soit d’être des bricolages sociétaux peu coûteux financièrement mais qui se sont avérés très difficiles à gérer politiquement, soit des usines à gaz législatives aux résultats plus qu’incertains.
On constate l’hésitation de plus en plus marquée (et prévisible) pour la réforme territoriale dont on se demande encore comment et pourquoi elle a pu aboutir si haut dans les priorités présidentielles. Alors que le pays s’enfonce dans le chômage, la présidence décide de redessiner la carte administrative du pays sans vraiment prendre le temps de consulter ceux qui seront aux premières loges. Inévitablement, la majorité parlementaire se fracture à ce sujet, et tous ceux qui le peuvent à l’Assemblée se regroupent pour faire barrages administratifs sur chicanes procédurales. Le sujet, à l’évidence, n’a pas fini de faire parler de lui.
Les petits pas désordonnés en arrière sont aussi visibles dans le traitement de la Loi ALUR, catastrophe législative dont tout indique qu’il va falloir l’abandonner au niveau des décrets, en essayant de limiter autant que possible les effets des annonces et des dispositifs déjà en place qui se sont jusqu’à présent traduits par une dégringolade sur le marché de l’immobilier. Dès sa conception, la loi présentait de graves défauts de malformations. La mise à bas s’est faite dans la douleur et c’est sans regret qu’on devra probablement enregistrer une morte-née dans les prochains mois, ou, à défaut, un légume sous respirateur qu’on débranchera pudiquement à la faveur d’un remaniement, d’une dissolution ou d’un changement quelconque de politique officielle. Bon débarras.
On apprend en outre que, finalement, seront abandonnés les ABCD de l’éducation, bricolage « éducatif » ajouté à la cohorte déjà affolante d’apprentissages indispensables enseignés aux élèves français entre la poterie, le macramé, l’art plastique et ces myriades d’autres choses qui n’ont rien à voir avec la lecture, l’écriture et le calcul de base. Bien évidemment, pour des raisons de politique politicienne et de ménagement d’un électorat très vocal, ce n’est officiellement que partie remise. Mais il n’est pas difficile de comprendre que ce revirement vise à ménager un peu de mou dans le front de contestations que le gouvernement sent monter.
D’ailleurs, la réaction vive et rapide de Fabius (pourtant ni spécialement vif, ni spécialement rapide d’habitude) sur la douloureuse augmentation récente des taxes hôtelières montre bien que certains, à l’Élysée et ailleurs, commencent à prendre conscience qu’il est plus que temps d’arrêter d’enfiler des boulettes. Petit à petit, plusieurs au parti socialiste font mine de prendre conscience de la criticité de la situation.
À droite, pendant ce temps, c’est la déroute. Et si l’on ne connaissait pas le penchant naturel de la droite pour faire à peu près n’importe quoi n’importe comment et s’entredéchirer pour des peccadilles internes, on en serait étonné. Depuis le fiasco rigolo des primaires et de la désignation d’un chef, foirade qui aura eu le mérite d’amuser la galerie et cacher au Parti Socialiste sa propre misère intellectuelle, l’UMP n’existe plus.
Coquille vide d’idées, de chef et de direction, elle est de surcroît pourchassé par une presse qui se réjouit déjà de la voir calancher, avec en prime l’ancien chef de meute, Sarkozy, comme trophée d’exception. À ce sujet, les rebondissements joufflus de l’affaire Bygmalion ont poussé un parti déjà relativement mal en point dans un fossé profond duquel monte à présent les petits couinements faiblards de la bête en agonie, qui ne parviennent qu’assez difficilement aux oreilles des Français, trop occupés avec une crise qui n’en finit pas.
Pas étonnant, dès lors, que le pauvre Nicolas se tâte de plus en plus vigoureusement pour sortir du bois et annoncer une candidature pour une présidentielle qui, pour rappel, n’est prévue que dans trois ans. Si, pour Hollande, ces trois ans semblent probablement terriblement courts, pour Sarkozy, on les imagine sans mal terriblement long, seule l’immunité présidentielle pouvant garantir sa peau pour une durée suffisante.
D’autant que, pendant ce temps, d’autres tentent de lui savonner la planche. Si Copé ne s’est pas gêné, c’est à Fillon qu’on pense actuellement alors que, de façon presque amusante tant sa lucidité calculée tranche avec ses cinq années de pouvoir en mode automatique, il tente de faire passer l’idée d’une réforme brutale en France afin de la remettre sur pied. On est en droit de s’interroger sur la solidité de Fillon face à ses propres propositions et on est loin de voir en lui l’Homme de Fer dont le pays aurait besoin.
…
Je résume. À gauche, cela sent tellement le roussi qu’ils sont obligés de faire marche arrière, sans le dire, timidement, et ne peuvent malgré tout s’empêcher d’ajouter des boulettes aux bévues. À droite, alors que le PS est en grande difficulté, l’UMP ne sait plus où il est, qui il est, où il va et comment il compte y aller. Alors que le PS n’est plus qu’un parti Parkinson, tremblant de tout ses membres dans un boogie tragique, l’UMP est un parti Alzheimer, perdu dans le dédales de pensées de plus en plus enfantines et légumineuses.
La politique française est devenu une olympiade de la neurologie déficiente. Le risque évident, lorsqu’on organise une course entre grands malades, c’est que le moins atteint d’entre eux parviennent au podium avant les autres. Et pour le moment, le parti qui se détache vraiment dans cette compétition ridicule est celui qui est atteint d’une sclérose en plaque.
Ça promet.
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