Le libéralisme est un ensemble de valeurs morales non une idéologie

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Chroniques en liberté
From the Archives : Originally published February 07th, 2013
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« L’économie de marché, fondée sur la liberté d’entreprendre et le capitalisme démocratique, un capitalisme privé, dissocié du pouvoir politique mais associé à l’Etat de droit, cette économie-là seule peut se réclamer du libéralisme ».

J.F Revel [2000], La grande parade, Editions Plon, Paris, page 71


Depuis que je suis engagé dans ce combat titanesque et quasiment sacrificiel, je suis convaincu que le libéralisme est la seule réponse viable à la crise que nous vivons depuis quelques décennies. D’abord parce que la crise est avant tout une crise morale et une perte des repères et des valeurs découvertes et proclamées fièrement par les philosophes des Lumières. Et nous avons oublié et trahi ces valeurs, de là découlent tous nos problèmes qu’aucune solution technique ou purement comptable ne pourra résoudre.

Et c’est bien une crise morale qui balaye notre pays. Quand les banquiers oublient leur cœur de métier et leur fonction nécessaire et irremplaçable, c’est toute la confiance qui est brisée mettant en cause les piliers eux-mêmes du système bancaire, pourtant maillon essentiel et indispensable à la croissance économique. Quand les hommes politiques, en charge de défendre l’argent public pour en faire le meilleur usage, déchaînent la dépense publique pour satisfaire les intérêts catégoriels et les revendications corporatistes, alors l’impôt perd sa légitimité tandis que le secteur productif est brisé par des prélèvements croissants. Quand des collégiens s’en prennent à leurs enseignants, que les parents démissionnent, qu’il est question de ne plus évaluer les écoliers ou de supprimer les devoirs à la maison et que les étudiants refusent toute sélection qui est pourtant le corollaire d’une orientation efficace, c’est tout le capital humain de la nation qui est dilapidé. Quand on veut toujours plus de droits, financés par l’Etat, mais que l’on refuse d’en assumer la charge et de supporter les devoirs qui en sont la nécessaire contrepartie, c’est la « guerre civile » permanente au lieu de la cohésion sociale et de l’harmonie nécessaire à l’épanouissement de l’économie. En bref, quand on veut toujours plus tout en donnant le moins possible sous le prétexte fallacieux de la solidarité, c’est la méfiance généralisée qui s’installe entre les individus.

Le libéralisme n’est pas l’agent de la régression sociale comme voudraient le faire croire ses trop nombreux détracteurs car le libéralisme est justement une éthique et un ensemble de valeurs morales sans lesquelles la science économique et la pratique de l’économie n’ont pas de sens. A toutes nos belles âmes, qui s’arrogent le monopole du cœur et de l’expression publique, il faudrait aussi rappeler que Robin des bois, qu’ils récupèrent volontiers comme symbole de leur combat contre la mondialisation, s’attaquait à un roi illégitime et spoliateur – et donc à l’Etat sorti de son rôle - pour rendre les richesses ainsi pillées à leurs créateurs et seuls propriétaires légitimes, c’est-à-dire aux contribuables. Il n’y a pas là de lutte des « puissants » en tant que riches contre les « faibles » en tant que pauvres. C’est un combat de toujours entre les spoliateurs parasites (les hommes de l’Etat qui abusent du pouvoir) et les véritables créateurs de richesses (les hommes libres et responsables qui créent des richesses). Ce combat ne sera jamais acquis car la liberté est toujours menacée car elle est une exigence et une discipline, fondées sur la responsabilité.

Il existe, en effet, une asymétrie fondamentale entre les « puissants », en tant que détenteurs du monopole de la violence légitime, et les « vulnérables » en tant qu’individus protégés par leurs seuls droits que les hommes de l’Etat ont trop vite fait de bafouer. Car il n’y a pas plus grand péril que d’être protégés par ceux qui ont le pouvoir de nous soumettre ; et que d’être dépendants de ceux qui ont le pouvoir de nous spolier. A l’heure où l’on nous demande de nous prononcer sur un projet de Constitution Européenne, il faut rappeler que le rôle d’une Constitution est justement de protéger l’individu du pouvoir politique et non de nous préparer à l’avènement d’un super-Etat européen étendant ses pouvoirs à l’ensemble des dimensions de nos vies.

Pourtant, selon tous nos dirigeants, il faudrait moins de libéralisme ou, du moins, il faudrait l’encadrer et le réguler avant qu’il ne ravage la planète et les sociétés. Nos hommes politiques, toutes tendances confondues, ne sont pas parvenus à gérer les comptes de l'Etat, mais ils prétendent gérer Arcelor-Mittal ou Peugeot. La guerre des chefs à l'UMP est en train de ridiculiser la droite, et ils voudraient redresser la France, ce que la gauche d'ailleurs est aussi incapable de faire. Et tout ce beau monde rejette le libéralisme...

Mais n’a-t-on jamais défini le libéralisme ? Ne croyons pas que le libéralisme triomphe partout sur la planète. Les sempiternelles négociations entre Etats par délégations ministérielles interposées, dans le cadre de l’O.M.C., montrent que c’est le mercantilisme qui est triomphant alors même que ce dernier est une négation du libéralisme. Les mercantilistes, parce qu’ils considèrent que l’économie est un jeu à somme nulle (ce que gagne un pays ou un individu est nécessairement perdu par un autre pays ou un autre individu) transposent dans l’économie leur vision antagoniste des rapports politiques et humains.
Ce sont eux qui font des échanges une véritable « guerre économique » comme ils se servent de l’aspiration universelle à la foi et à la spiritualité pour nourrir leurs guerres de religions. Les arguments protectionnistes n’ont aucune validité puisqu’ils reviennent à nous infliger à nous-mêmes en temps de paix ce que nos adversaires chercheraient à nous faire subir en tant de guerre. Comment une armée peut-elle soumettre un pays ou une ville si ce n’est en décrétant le blocus ou l’état de siège qui a justement pour fonction d’étouffer l’adversaire en interdisant les échanges, préalable nécessaire à toutes activités économiques.

A leur origine, les accords du G.A.T.T. avaient pour mission de veiller à ce que tous les pays démantèlent leurs propres systèmes de protection puisque aucun ne voulait le faire s’il n’avait pas la garantie que les autres fassent de même. En transformant les accords du G.A.T.T. en O.M.C qui se présente comme une instance de régulation du commerce, les Etats – et notamment la France qui est à l’origine de cette conversion – ont pris le risque de faire triompher à nouveau le mercantilisme. Et quand le mercantilisme triomphe, ce sont toutes les valeurs du libéralisme qui reculent. Alors le commerce, naturellement source de paix et de prospérité, devient aux mains des Etats et de leurs représentants officiels, l’enjeu de chantages diplomatiques et de calculs géopolitiques.

L’histoire et la science économiques montrent que le libéralisme libère et protège les faibles contre les puissants. Comme les puissants n’ont pas spontanément tendance à mettre en œuvre un tel processus de libération et de libéralisation qui irait à l’encontre de leurs intérêts et privilèges, il faut des institutions fortes pour garantir un Etat de droit, c’est-à-dire un Etat respectueux des droits individuels fondamentaux, et qui daigne auto-limiter ses appétits de pouvoir. Un Etat libéral au sens originel du terme pour reprendre la vision de Benjamin Constant.
A tous les croyants qui ont des doutes sur la possible conciliation – ou réconciliation - entre un engagement libéral et leur foi religieuse, l’histoire montre que ce sont les pays communistes qui furent les plus anti-religieux. Et l’Etat-providence en France nourrit l’ambition de se substituer à la providence elle-même de la même manière que le communisme avait la prétention d’apporter le paradis en ce bas monde. Pour un croyant, un homme est d’abord un fils de Dieu avant d’être homme ou femme en particulier, patron ou salarié en particulier, riche ou pauvre en particulier. Et, tous les hommes sont les fils de Dieu. Pour un libéral, un homme est d’abord un individu avant d’être homme ou femme en particulier, patron ou salarié en particulier, riche ou pauvre en particulier. Et tous les hommes sont des individus.

Cette notion d’individu « abstrait » est fondamentale car elle fonde l’Etat de droit : les lois sont faites pour protéger l’individu « abstrait », c’est-à-dire tous les hommes dans ce qu’ils ont d’universels. On ne doit pas faire ni des lois de circonstances pour tel ou tel individu concret, ni des lois discriminatoires pour protéger (que cette discrimination soit dite « positive » ou pas) et différencier ainsi telle ou telle catégorie spécifique sans mettre en péril l’Etat de droit.

C’est cet ensemble de valeurs humanistes qui fait le souffle et la grandeur du libéralisme, pas seulement son efficacité économique, qui permet cependant à un nombre croissant de pays de goûter aux fruits de la prospérité. Car sans la richesse économique, point de développement social, de rayonnement culturel ou de puissance politique. Voilà pourquoi le libéralisme est la seule réponse possible à la crise actuelle. Et plus on s’obstinera à nier cette évidence, plus on s’enfoncera dans la crise.
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Docteur en sciences économiques de l'université de la Méditerranée et Maître de conférences – HDR - à l'IAE de l'université de Perpignan. Médaille du Bibliographical Institute of Cambridge (London, 2012), il est spécialiste de croissance économique ainsi que chercheur en tourisme international et consultant pour l’Organisation Mondiale du Tourisme (Nations-Unies). Il signe des chroniques économiques dans la presse nationale (Les Echos, Le Monde, le Figaro, Economie-Matin) et internationale (l’AGEFI le quotidien suisse des finances, le Boston de Providence aux USA, le Québécois Libre à Montréal). Il anime enfin, depuis plus de 15 ans, un blog à vocation pédagogique, Chroniques en liberté, à l'attention de ses étudiants et du grand public. Ouvrages [1] Les défis économiques de l'information, la numérisation, L'Harmattan, Paris 1996. [2] L’innovation dans l’industrie du tourisme - Enjeux et stratégies. En co-écriture avec B. Solonandrasana, L’Harmattan, Paris, 2001 [3] L’épopée de l’innovation – Innovation technologique et évolution économique, L’Harmattan, Paris, 2005. [4] L’innovation dans l’industrie du tourisme. Enjeux et stratégie, avec B. Solonandrasana, L’Harmattan, Paris 2006. [5] Fondements d’économie du tourisme. Acteurs, marchés, stratégies. De Boeck Université, Bruxelles 2007. [6] Le modèle français dans l’impasse, Tatamis Editions, Paris 2013. [7] Histoire thématique et contemporaine des faits économiques, Ellipses, Paris 2015. [8] Analyse de la finance internationale : le grand naufrage, en co-écriture avec Faouzzi Souissi (Trader),The Book Edition, Paris 2019.
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Monsieur Caccomo se débat dans l'impasse du minarchisme. Il a compris que les Etats sont la cause de nos malheurs et il conclut qu'il suffit de remplacer les gros Etats méchants par des petits Etats gentils.
Il ferait mieux d'admettre que l'Etat n'a aucun droit sur les individus à moins d'avoir signé avec eux un contrat. Les Etats n'ont jamais été autre chose que des organisations mafieuses quelques soient les prétextes de "service public" invoqués.
Les fonctionnaires (professeurs inclus) ne sont que des employés de cette grande mafia qui elle-même n'existe que grâce à ses gendarmes et à ses percepteurs.
Avez-vous peur de perdre votre emploi et votre retraite au point de ne pas vouloir voir la vérité ?
Lisez les "anarcaps" : Rothbard, Hoppe, etc.
Libérez-vous une bonne fois du faux libéralisme !
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Et hop ! Caccomo explique que le libéralisme n'est pas à regarder comme une idéologie, et l'inévitable idéologue arrive nous expliquer qu'il faut par la magie de sa baguette magique détruire l'État, tous les États même parce que tant que les autres s'organisent comme ça, le supprimer chez soi — à supposer que ce soit possible —, pose quand même quelques problèmes. Et que la seule réalité libérale souhaitable serait intégrale, complète, entièrement conforme aux principes libéraux les plus abstraits. Pragmatisme connaît pas et il n'existe pas de gradations dans la réalité ainsi plaquée sur l'idéal avec lequel on pense : Singapour ou la Suisse, c'est finalement exactement comme le Vietnam ou le Vénézuela...

C'est à désespérer et à se demander quelle différence structurelle existe entre d'une part la pensée libérale comprise ainsi comme entièrement et seulement idéologique qui veut, quand on analyse un peu ses vues, sortir du politique et même le nier, et d'autre part la pensée idéologique communiste qui voulait en sortir et le nier aussi aussi...
Lis la citation de J.F. Revel en introduction : le libéralisme a besoin de l'état de droit.
La liberté est indissociable de la responsabilité, c'est écrit dans le texte.
Le libéralisme n'est pas une idéologie parce qu'il laisse aux gens le choix de vivre comme ils veulent avec comme seule limite de ne porter tort à qui que ce soit.
Se méfier du discours socialiste qui prétend que le propriétaire fait du tort à celui qui qui ne l'est pas. C'est faux. La propriété est un droit, la jalousie est un bas instinct.
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Pierre70 - 6/10/2017 at 8:18 AM GMT
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