Le Chapelier était un avocat au parlement de
Bretagne au 18ème siècle. Il est connu pour une loi
révolutionnaire de 1791. Le principe de cette loi était simple.
Il s’agissait d’établir
la liberté d'exercer une activité professionnelle. Son texte
prévoit qu’« Il sera libre à toute personne de
faire tel négoce ou d'exercer telle profession, art ou métier
qu'elle trouve bon ». C’était la fin des corporations
et des professions réglementée
Une nouvelle loi le Chapelier permettrait de
décloisonner le marché du travail. En effet, dans toutes
sortes de professions comme celles des taxis, des coiffeurs, des notaires ou
encore des pharmaciens, il existe des réglementations qui dressent des
barrières à l’entrée insurmontables pour qui
n’a pas le bon diplôme, le bon numéro (quand il existe un
numerus clausus), etc.
Le Chapelier est mort depuis des siècles, mais son
approche est toujours d’actualité. Attali rappelait dans son
rapport de 2008 combien il était important d’ouvrir les
professions réglementées pour libérer la croissance
française. Avant lui, d’autres personnes tout aussi
éminentes avaient mis le doigt sur cette caractéristique
française : le rapport Rueff-Armand de 1960, celui de Cahuc-Kramarz en 2004, ou encore de Michel Camdessus en
2005.
Prenons un
exemple qui fait l’actualité en ce moment, à savoir celui
des taxis sur lequel nombre de politiques ont achoppé. Le
marché des taxis se caractérise principalement par un numerus
clausus qui a organisé en quelque sorte l’inefficacité de
la profession et suscite nombre de mécontentements de la part des
consommateurs. En effet, ce numerus clausus empêche la profession
d’évoluer alors que la demande existe et a conduit à un
ticket d’entrée pour devenir taxi particulièrement
onéreux, en moyenne 130 000 euros pour avoir une plaque et le
droit d’exercer ce métier en indépendant.
Avec
l’apparition des smartphones, de la
géolocalisation et du paiement en ligne, des entrepreneurs se sont
engouffrés dans une brèche crée en 2009 en offrant des
voitures de tourisme avec chauffeur (VTC) qui marchent aujourd’hui sur
les plates bandes des taxis actuels puisque leur
prix est maintenant proche de celui des taxis et leur capacité
à répondre à la demande plus rapide.
Le lobby des taxis n’a pas tardé à se
manifester par des grèves et des revendications supplémentaires
pour protéger leur profession. Ils viennent d’obtenir un
délai de 15 minutes entre la commande passée et le début
de la course, à savoir que maintenant même si on obtient un
véhicule en 7 minutes, il faudra encore attendre à
l’intérieur 8 autres minutes pour démarrer. Autant dire
que cela ferait perdre du temps à tous et réduit dramatiquement
l’intérêt de la concurrence. C’est un peu comme si
l’on demandait aux fournisseurs d’accès internet de
ralentir le débit pour éviter de concurrencer la poste, dont
les délais d’acheminement du courrier sont nécessairement
plus longs.
Déréglementer
un certain nombre de professions serait susceptible de faire profiter des
marchés entiers protégés de la concurrence, de
l’innovation, des gains de productivité et donc in fine
d’une meilleure allocation des ressources humaines, notamment quand on
sait que certaines professions seraient particulièrement accessibles
à des individus peut être pas
très qualifiés mais dynamiques, fiables et motivés.
Pierre
Cahuc rappelle les effets positifs de la
déréglementation de cette profession en Irlande. Entre novembre
2000 et mars 2003, le nombre de taxis en Irlande a augmenté de 150%. A
Dublin, le nombre de taxis par habitant avait plus que doublé en
quelques années passant de 1 taxi pour 186 habitants à 1 taxi
pour 72 habitants. Il n’y a donc plus qu’à espérer
que nous n’aurons pas besoin d’une révolution pour mettre
en place une loi qui l’était effectivement.
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