2012 a
été une année noire pour les thuriféraires du
téléchargement. En janvier de cette année, le FBI
décida de mettre un terme à l’aventure Megaupload, ce qui provoqua un vent d’indignation important.
Selon
certaines rumeurs,
le site aurait été fermé uniquement parce que son
fondateur, Kim Dotcom, préparait son fameux
projet MegaBox, si inquiétant pour les
majors…
Et c’est
à cette occasion qu’on voit que l’État
protège plus les intérêts desdites majors
que ceux des artistes. En effet, le projet MegaBox
(qui n’est d’ailleurs pas mort-né,
ainsi que le rappela récemment Kim Dotcom)
prévoyait de rémunérer ces derniers à hauteur de
90% sur leurs ventes. C’est d’ailleurs la principale
différence entre Megaupload et MegaBox.
Or, le
principal argument contre le téléchargement,
jusqu’à présent, consistait en le fait qu’il
était extrêmement défavorable aux intérêts
des artistes et que, de ce fait, ils ne pouvaient plus réellement
vivre de leur activité. On a eu droit, encore récemment,
à quelques campagnes médiatiques de plusieurs d’entre eux
afin de réclamer un renforcement de leurs droits de
propriété intellectuelle. Force est de reconnaître
qu’ils ont su toucher les cœurs et exercer une influence
considérable sur le législateur.
Et, justement,
le système MegaBox permettait de mettre fin
à cette contradiction de droits. Mais il semblerait qu’aux États-Unis,
les majors aient des compétences bien aiguisées en ce qui
concerne le lobbying…
Bien
heureusement, la manière dont le site Megaupload
fut fermé et, surtout, la façon musclée
dont ses responsables ont été arrêtés a
choqué l’opinion. Le FBI et le ministère de la Justice
américain ont beau ne pas craindre l’emphase en parlant de
d’une des plus « grandes affaires de violation des droits
d’auteur jamais traitées aux États-Unis», personne
n’est dupe ou ému par ce communiqué.
Peu
après, un réseau de pirates du Net, les Anonymous,
s’est alors formé et a réussi à mettre
provisoirement hors-service les sites du… FBI et du Ministère de
la Justice, ce qui n’est pas une mince performance.
La justice
néo-zélandaise vient (heureusement) de déclarer illégale
la perquisition effectuée au sein du manoir de Kim Dotcom,
laquelle avait, par la suite, débouché sur l’envoi de
documents aux autorités américaines.
La France
n’est pas non plus épargnée par les critiques du fait,
notamment, de sa loi Hadopi et des propos assez
irresponsables tenus par Nicolas Sarkozy au moment de la fermeture de Megaupload. De plus, la loi, dans sa version
pré-censure du Conseil constitutionnel, prévoyait des sanctions
pénales pour les personnes « coupables » de
téléchargement illégal.
Car on touche
bien là à un autre défaut de nos sociétés
contemporaines : la pénalisation sans freins de tout acte
déviant. Quelle que soit la position que l’on adopte sur les
droits de propriété intellectuelle, il demeure tout de
même curieux que le législateur ait voulu créer ex nihilo une sanction pénale
pour cela. Cela ne pourra que contribuer à alourdir toujours plus une
justice pénale déjà très embouteillée et
dans laquelle de nombreuses plaintes sont classées sans suite, non pas
par manque de qualification juridique mais par simple pragmatisme et
volonté d’alléger les services.
Aujourd’hui,
malgré les efforts déployés par les gouvernements en la
matière, les sites de téléchargement continuent de
prospérer. Par exemple, une personne avide d’ouvrages en ligne
gratuits pourra toujours se connecter à Usenet et y télécharger
une bibliothèque complète d’ouvrages en
économie-gestion. Notons toutefois que la complexité de la loi Hadopi a pour conséquence de rendre Usenet
légal.
Les hommes de
l’État ont peut-être compris qu’il était
impossible de nettoyer le Net à leur guise. Il est nécessaire
d’y préserver quelques zones de liberté sous peine de
soulever un nouveau et dangereux mouvement de pirates du Web.
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