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Indépendance énergétique des USA : la déception sera terrible

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Published : November 29th, 2012
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Category : Editorials

 

 

 

 

Ceux qui gravitent dans la sphère économique ont dû transpirer la semaine dernière, lorsqu’était publié un rapport de l’Agence Internationale de l’Energie basée à Paris stipulant que les Etats-Unis prendraient bientôt la place de l’Arabie Saoudite en tant que premier producteur mondial de pétrole pour atteindre leur nirvana d’indépendance énergétique qu’ils nous ont tant fait miroiter. Aux Etats-Unis, la nouvelle a été accueillie avec jubilation. Bienvenue dans un monde où le pic de la crédulité rencontre le pic de l’ânerie.


Nous savons depuis un moment que les autorités de nombreux domaines – politique, économie, business et médias – s’efforcent de maintenir l’illusion que les Etats-Unis sont capables, bien qu’à grand peine, de maintenir en place leur mode de vie. Par la faute des élites, le divorce entre vérité et réalité est quasi-total. Le système financier ne fonctionne aujourd’hui plus que par la fraude comptable. Le gouvernement n’est maintenu en place que par ce qu’il lui reste d’outils statistiques frauduleux. Le commerce du gaz et du pétrole fonctionne sur le dos de la fraude des relations publiques. Quant aux médias, ils survivent grâce au désir incompréhensible des masses à croire en tous les mensonges qui leurs sont débités quant à leur capacité future à maintenir leur petit confort moderne.


A partir de 2005, il a été répété de nombreuses fois que les nappes de pétrole du Nord-Dakota, du Texas, de Louisiane, de Pennsylvanie, de New York et de l’Ohio permettraient aux Américains de conduire jusqu’au WalMart le plus proche jusqu’à la fin des temps. Etonnamment, le pic du pétrole était atteint cette même année.


Il arrive parfois que les renseignements concernant la production de pétrole et de gaz soient si abstrus que les éditeurs du New York Times, de Bloomberg News Services, de CNN et d’autres géants des médias avalent tout cru les rapports de l’AIE, et qu’une nation affligée par le doute quant à son futur parte en vacances l’esprit en fête – nous deviendrons bientôt numéro 1, notre futur est garanti ! Qu’ils passent un bon Thanksgiving et un joyeux Noël… J’espère qu’ils seront prêts à dessoûler en 2013. Lorsque la vérité viendra finalement à éclater au beau milieu de ce marasme de cachoteries, la déception sera terrible.


C’est pourquoi l’histoire des nappes de pétrole des Etats-Unis n’est en rien un changement de donne, comme le pensent les plus crédules : la somme requise pour extraire ce pétrole du sol (80 à 90 dollars par baril) portera grandement atteinte à l’économie Américaine. Et puisque les prix sont déjà si élevés, l’économie en souffre déjà. La conséquence en sera une économie en contraction plus ou moins permanente. Comme la demande en pétrole décline parallèlement à l’économie, le prix du pétrole chute – et il continuera de chuter jusqu’à tomber en-deçà du prix qui rendrait son extraction rentable.


A mesure que l’économie se contracte et que la croissance économique dont aurait besoin notre système disparaît, les problèmes auxquels fait face le monde des finances et de la banque ne font que s’aggraver. Tout ceci est principalement dû au fait que la monnaie, qui a jusqu’alors été empruntée, ne peut plus être remboursée. Les emprunts font l’un après l’autre l’objet de défauts. Les gouvernements jouent des jeux dangereux avec l’argent public – ainsi qu’avec la ‘monnaie’ qu’ils créent à partir de rien – et l’utilisent pour soutenir les banques. Et rien de tout cela ne règle le problème d’une quantité insuffisante de monnaie réelle dans l’économie. Les conséquences de ces pitreries désespérées ne seront autres qu’une détérioration de la formation de capital, c’est-à-dire d’un échec à créer du capital nouveau. L’absence de formation de capital, en parallèle à l’impossibilité pour les gouvernements à rembourser leurs dettes, entraîne une pénurie du crédit, tout particulièrement pour les entreprises qui en ont besoin en quantités énormes pour mener à bien des opérations coûteuses telles que l’extraction de gaz et de pétrole de schiste.


Le gaz et le pétrole de schiste ont des propriétés quelque peu problématiques. Creuser un puits de pétrole peut coûter entre 6 et 8 millions de dollars, et chaque puits est rapidement épuisé. Les puits du champ de Bakken, dans le Nord du Dakota, sont généralement épuisés à hauteur de 40% après un an. Le pétrole n’est pas distribué de manière égale dans les nappes, et il existe des endroits plus riches en pétrole que d’autres. Les gisements les plus importants ont été épuisés les premiers, et la qualité des sites d’extraction potentielle qu’il reste aujourd’hui est sur le déclin. La tendance actuelle présente un déclin de 25% de la productivité des nouveaux puits au cours de leur première année d’activité.


Il existe plus de 4300 puits de pétrole au Nord du Dakota, qui produisent environs 610.000 barils par jour. Afin de maintenir un tel niveau de production, le nombre de puits devra augmenter à un rythme bien plus rapide qu’auparavant. C’est ce que l’on appelle le ‘syndrome de la Reine Rouge’, qui fait allusion au personnage d’Alice au Pays des Merveilles qui a déclaré devoir courir toujours plus vite pour rester où elle se trouve. Le problème de la formation de capital attend patiemment en arrière-plan, et fera qu’il n’y aura tôt ou tard plus assez de capital pour construire de nouveaux puits et maintenir la production aux niveaux actuels. En d’autres termes, le pétrole de schiste est une pyramide de Ponzi. La situation d’Eagle Fort, au Texas, est très similaire.


Je n’ai pas fait mention des effets du forage sur les nappes phréatiques, et ne m’y aventurerai pas. Disons juste qu’ils s’ajoutent encore au problème.


En matière de prix, on neut mettre dans le même sac le gaz de schiste et le pétrole de schiste. L’extraction intensive de gaz de schiste a entraîné une surabondance, ce qui a fait passer son prix de 13 dollars l’unité (1000 mpc) à 2 dollars en début d’année. A un tel prix, il n’est plus rentable de forer et d’en extraire plus. Cet effondrement de prix a eu de nombreuses retombées pour les compagnies spécialisées dans le domaine, bien que leurs clients en aient fortement bénéficié. Une importante quantité de matériel de forage a été retirée de la région du Nord du Dakota. Bientôt, il y aura moins de gaz disponible, et son prix augmentera de nouveau. Il devra franchir la barre des 8 dollars l’unité pour que les sociétés recommencent à en extraire. Mais comme c’est souvent le cas pour ce type de correction, son prix passera certainement bien au-dessus de 8 dollars, ce qui le rendra impayable pour une majorité de clients. Sa volatilité seule rend la production de gaz de schiste impossible à stabiliser. Oubliez donc tout ce que vous avez entendu au sujet du futur des Etats-Unis comme exportateur de gaz.


Vous avez certainement compris le problème, mais j’aimerais ajouter quelques notes supplémentaires quant à l’idée que les Etats-Unis puissent devenir énergiquement auto-indépendants.


- Leur production se fait désormais si lentement à Prudhoe Bay, en Alaska, que le fameux pipeline pourrait ne jamais être utilisé. Si l’extraction de pétrole venait à chuter jusqu’à atteindre un volume critique, il faudrait plus de temps pour transporter l’or noir. Le pétrole pourrait finir par refroidir et prendre une consistance boueuse à mesure que l’eau qui le compose gèle – ce qui pourrait également endommager le pipeline. Il n’y a bien entendu pas assez d’argent disponible pour réparer un pipeline dans une région dans laquelle il est difficile d’extraire du pétrole.


- Les pays exportateurs de pétrole (ceux qui envoient du pétrole vers les Etats-Unis) consomment désormais leur propre pétrole et voient leurs réserves chuter, ce qui entraîne une diminution de leur taux d’exportation annuel. La Chine, l’Inde et d’autres nations en cours de modernisation profitent grandement de ce déclin de taux d’exportation.


- Je ne me suis pas attardé sur les forces géopolitiques qui se cachent derrière la dynamique de production de gaz et de pétrole. En voici une intéressante : un jour viendra où les Etats-Unis auront à employer la doctrine Monroe pour forcer le Canada à ne plus exporter son pétrole ailleurs qu’en Amérique du Nord. Je vous le garantis.


Voici également une prévision dont j’ai déjà fait mention auparavant : le Japon sera la première nation à opter consciemment pour une économie industrielle avancée. Il n’aura aucun autre choix, ne possédant aucune réserve de pétrole, de gaz ou encore de charbon, et ayant perdu toute confiance en l’énergie atomique. Il sera le premier pays à entrer dans un monde où tout sera fait main. Les Japonais étaient déjà doués pour cela avant 1850, et ont une brillante culture artistique – malgré les effets qu’elle peut avoir sur la psychologie humaine.


Je ne pense pas que les Etats-Unis puissent subir une telle transformation dans le calme. Ils sont bien trop attachés à leur techno-narcissisme et à leur grandeur. Ce qui m’inquiète, c’est qu’ils ne se rendront compte de la situation que lorsqu’ils ne pourront plus rouler jusqu’au WalMart le plus proche. Etant prédisposé à la superstition et au fanatisme religieux, le public Américain rejettera d’un bloc science et rationalité, et se retirera dans un bien sombre monde. Et ils n’en sont pas loin aujourd’hui. Le rapport de l’AIE ne fera qu’accélérer les choses.



 

 

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James Howard Kunstler est un journaliste qui a travaillé pour de nombreux journaux, dont Rolling Stones Magazine. Dans son dernier livre, The Long Emergency, il décrit les changements auxquels la société américaine devra faire face au cours du 21° siècle. Il envisage un futur prochain fait de crises sociales à répétition, la fin de la Surburbia et du modèle économique associé, une guerre mondiale pour les ressources en énergie. Il prédit la déconstruction des empires européens et américains et pense que, lorsque les convulsions seront terminées, le monde fonctionnera de manière décentralisée et local.
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voila qui est dit sans la moindre concession.
mais, nous le savons bien , la propagante permet de recourir a la langue de bois, et la langue de bois permet de gagner du temps.
aussi , qui peut nous dire a quels prix seront les cours du petrole d'ici quelques annees......qui ?
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tout à fait en phase avec les données dont je dispose.
de toute façon, même pour quelqu'un qui n'est pas dans le domaine c'est pas compliqué : à partir du moment où un organisme de propagande officiel vous balance une donnée, reprise en cœur par tous les mercenaires des médias, vous pouvez être sûr que c'est complètement faux et que l'inverse va se passer.
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C'est comme pour le pétrole de la Guyane, tous les médias en n'ont parlé. Donc, çà va pas se faire. Un peu court comme raisonnement. Moi je suis certain que le pétrole guyanais coulera.
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prenez des actions alors, lol.
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Africa Oil a été mulitiplié par 10 dernièrement et j'étais dessus. J'aime bien le pétrole.
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bien bien, faites donc ;)
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Vous avez certainement du dire : multiplié par 5 ?! C'est bien quand même ! mais normal pour une action hyper spéculative sans PER !!!
Vous avez autant de chance qu'elle soit divisée par 5 sur la même durée.....ceci dit si vous avez d'autres tuyaux, je suis preneur !
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Dernièrement Casey a publié un article optimiste sur Africa Oil même après sa multiplication par 10 (perso j'ai revendu). Africa Oil est un dossier solide, avec derrière un acteur puissant Tullow Oil qui a fait lui même x10 sur la dernière décennie, c'est une grosse junior maintenant. Un autre dossier que je suis est Stream Oil très spéculatif mais prometteur, il ressemble à Banker Petroleum qui avait fait un rally fois 10 lui aussi. Czci dit je suis resté plus de 18 mois sur Africa Oil pour faire cette performance.
Faut investir "cynique", comme je l'avais lu dans un article cynico-humoristique : les métiers d'avenir sont des trucs du genre fabricant de balles en caoutchouc, prostitution.... (il existe bien une formation de prostitution en Espagne, alors bientôt une cotation en bourse ? ).
Selon certains, la crise pourrait sonner le glas du secteur écolo ? Alors faut investir dans le polluant (gaz de schiste ? ).
A moins qu'une révolution technologie ne nous sauve ? (nanotechnologie, ordinateurs quantiques)

Au 17-18e siècle, l'Europe courait à sa perte car son économie était basée sur le bois (le bois construisait tout, chauffait tout). Mais quand on coupe les arbres plus vite qu'ils ne poussent, ils finissent par disparaître.
Impossible de sortir de cette impasse, les arbres repoussent trop lentement, l'Europe allait se retrouver paralysée, détruite...... et là, miracle, la révolution industrielle arrive et on convertit l'économie-bois en économie-charbon.
(Il faut savoir qu'aujourd'hui il y a plus de surfaces boisées en Europe occidentale qu'il n'y en avait au 18e siècle).

Ensuite ce fut le pétrole.....puis l'énergie nucléaire.

Et maintenant ?
La révolution "verte" traîne un peu..... avons-nous atteint le bout ? On parle de rouvrir les mines de charbon, on fabrique des poêles à pellet (donc on se chauffe de nouveau au bois)... retour en arrière, pour mieux sauter en avant ? Espérons-le, car sinon c'est la fin.
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Oui, c'est bien vu ce mouvement un pas en avant, un pas en arrière. C'est exactement ce que nous sommes en train de vivre. Récemment, j'ai vu une émission sur les centrales solaires à convergence sur arte. La France était pionnière dés les années 60 dans le domaine, avec un four solaire dans les Pyrénées, et puis plus tard avec le projet Thémys qui a fonctionné pendant 3 ans puis a été abandonné pendant 25 ans par EDF au motif ridicule que l'électricité produite était trop chère (le but n'étant pas courtermiste, mais de long terme), puis a été repris récemment. Bilan 25 ans de perdu dans le solaire thermique, alors qu'entre temps des tas de centrales de ce type ont été développées dans le monde.
Une autre émission, sur arte, montrait en fait que l'électricité solaire est la moins chère du monde. Ce n'est qu'une myopie courtermiste, qui empêche de le comprendre. Certes, si l'électricité coûterait 3 fois plus chère à court terme, le solaire serait la plus concurrentielle de toutes les énergies à moyen long terme, à condition de raisonner en coûts induis, c'est à dire en coûts incluants l'environnement et la santé humaine (et les gains à faire sont absolument énormes).
C'est toujours, le profit à court terme qui tue les projets profitables à long terme. 1% de la surface du Sahara suffirait à alimenter la planète en électricité, notre époque c'est vraiment l'antiquité.
Conjuguer la puissance du solaire aux économies d'énergies, autre levier puissant de gains (il suffit de voir ce que les leds apportent dans le domaine de l'éclairage, bientôt 1 watt led remplacera 100 watts en incandescence).
Oh que si ils peuvent atteindre l'indépendance énergétique : il suffit d'enfoncer de plus en plus d'américains dans la misère (tendance actuelle, suffit de voir combien d'entre eux sont à la soupe populaire), comme ça ils n'utiliseront plus de voiture.
En fait ce sont les riches américains qui bénéficieront d'une indépendance énergétique.

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remarquez, c'est pas faux. à se priver d'eau potable (et utilisable pour l'agriculture) ils vont au devant d'une gestion démographique obligatoire. mais bon, dans ce genre de période c'est tendu même pour une dictature de tenir en place.
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Roxan - 11/30/2012 at 9:07 AM GMT
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