La "franchise", le dernier oxymoron implicite trouvé.

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Published : May 29th, 2007
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Category : Fundamental

 

 

 

 

"Ce que Jupiter veut perdre, il les rend fous" a chanté le poète. Nous y sommes en matière de "sécurité sociale maladie".  Le train de l'organisation s'est emballé depuis longtemps… Le sens des mots la concernant en arrive aujourd'hui à s'en trouver, plus que jamais peut-être, dévoyé.

Ce n'est plus un "plan" de plus que le nouveau gouvernement FILLON sous présidence SARKOZY va édicter en la matière, - le mot "plan" est banni du discours politico-technocratique -, c'est la "franchise".
Qu'il n'y ait pas d'erreur de compréhension, il ne s'agit pas de la franchise à quoi on pense instinctivement, à la bonne franchise qui consiste à appeler un chat un chat, mais d'une franchise … mensongère, nouvel oxymoron implicite, dans le domaine de l'assurance.

La franchise – la franche - est celle dont conviennent contractuellement, dans un monde de liberté, l'assureur et l'assuré, étant donné un risque de perte de patrimoine de l'assuré bien défini et évalué par l'assureur à partir de son expérience, des lois statistiques et de l'organisation des marchés de l'assurance maladie et de la réassurance maladie.

La franchise que le gouvernement semble vouloir édicter pour 2008 n'est qu'une nouvelle réduction ciblée – à quatre cibles - des "RIRES maladie" ("RIRES" pour réparations, indemnisations, remboursements, expédients sociaux fournis par le régime général de l'organisation de sécurité sociale obligatoire maladie - en abrégé, OSSO maladie -).  Elle est donc mensongère. 

Elle est mensongère à plusieurs titres et, en particulier, car nous ne sommes pas dans un monde de liberté de refuser d'être immatriculés à l'OSSO et affiliés à un régime d'OSSO, car l'OSSO maladie n'a rien à voir avec une assurance maladie – qu'on dénomme aussi "assurance santé" ailleurs qu'en France -, car le principe de l'OSSO est très exactement de ne pas chercher à définir et à évaluer les risques de perte de patrimoine de chaque personne couverte "car ce serait entré dans son intimité et cela est contraire aux 'droits de l'homme'" affirmait-on, toute honte bue, en 1945-46.


1. Franchise mensongère et dernière - en date - procédure d'alerte.

Cette "franchise mensongère" fait suite à une "procédure d'alerte sur les dépenses maladie", nouvelle appellation sobriquet pour désigner l'action d'un "comité d'alerte sur l'évolution des dépenses d'assurance maladie", comité Théodule instauré par la loi du 13 août 2004 du gouvernement RAFFARIN sous présidence CHIRAC.

Placé auprès de la "Commission des comptes de la sécurité sociale" (cf. ci-dessous), le comité d'alerte est composé de trois personnes: le secrétaire général de cette commission ( aujourd'hui François Monier), le directeur général de l'Insee (aujourd'hui Jean-Michel Charpin), et une personnalité qualifiée désignée par le président du Conseil économique et social (CES) (aujourd'hui Michel Didier, directeur général de l'institut Coe-Rexecode). Sa mission porte uniquement sur le volet RIRES de l'OSSO maladie.

Selon la procédure fixée par la loi, le comité d'alerte "notifie au Parlement, au gouvernement et aux caisses nationales d''assurance maladie'" le risque encouru. Suite à cela, les caisses "proposent des mesures de redressement" financier, sur lesquelles "le comité rend un avis", ainsi que sur "celles que l'Etat entend prendre pour sa part". En d'autres termes, le gouvernement doit trouver des moyens de réduire les RIRES maladie. Le gouvernement dispose d'un mois pour faire ses propositions à partir de la notification de la procédure d'alerte.

Or le 6 avril 2007, le comité d'alerte a indiqué que les évolutions des dépenses constatée en 2006 et début 2007 "rendront très difficile le respect de l'objectif fixé par le Parlement" pour 2007, soit un montant de dépenses de 144,8 milliards d'euros. Il a aussi estimé que le franchissement du seuil fatidique de 0,75% au-dessus de l'Ondam pourrait être empêché "que si les économies prévues lors de la construction de l'Ondam 2007 sont intégralement réalisées".

Et BACHELOT, ministre de la Santé en exercice, a reconnu le 27 mai suivant que le dépassement de l'Ondam 2007 s'élevait à environ 2 milliards d'euros.
Les RIRES en matière de "soins de ville" étant ciblés, il faut rappeler que le gouvernement s'attendait à une augmentation de 1,1% en rythme annuel. Après un léger mieux en mars, les RIRES en matière de "soins de ville" ont néanmoins augmenté de 5,5% en avril. Bref, sur les quatre premiers mois de l'année, la hausse est de 5%. On est loin des anticipations officielles.
Pour sa part, l'OSSO maladie a ciblé deux autres types de RIRES non satisfaisant, les RIRES en matière d'"actes techniques des médecins spécialistes" et ceux en matière de "transports sanitaires".


2. Une procédure d'alerte d'une autre nature est en cours depuis longtemps.

Cette franchise mensongère fait surtout suite à une série de dégâts sans précédent, prévisibles - sauf apparemment par les hommes de l'Etat -, qui ne font que s'amonceler et que ces derniers ont prétendu balayer périodiquement.  L'ensemble définit en vérité une procédure d'alerte en cours depuis des années dont les hommes de l'Etat ne veulent pas voir la nature.


Il y a dix ans, 1997 :
première année d'entrée en vigueur de la réforme de l'organisation de la sécurité sociale maladie décidée par le gouvernement JUPPE sous présidence CHIRAC (1995-96) : tout devait être résolu.
L'OSSO maladie était en partie étatisée, il y avait en particulier liquidation de la dette sociale - une bonne fois pour toutes - avec la création de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) – et celle de la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) -, l'augmentation du taux de la CSG, l'instauration de la loi de financement de la sécurité sociale votée annuellement par le Parlement, l'ONDAM (pour objectif national de dépenses d'"assurance maladie") les création d'agences, d'autorités – plus ou moins "hautes", etc. 
Certes, les partisans de la réforme diront que la situation serait pire si la réforme n'avait pas été mise en oeuvre.


Il y a vingt ans, 1987 :
sous la houlette de SEGUIN, ministre des affaires sociales – aujourd'hui président de la Cour des Comptes - dans un gouvernement CHIRAC sous présidence MITTERRAND, c'était le "dix septième plan santé" depuis la première convention nationale maladie (1971) pour freiner la dérive des RIRES maladie. La création de la "Commission des comptes de la sécurité sociale" par le gouvernement BARRE à la fin de la décennie 1970 n'y avait en définitive rien fait.


Il y a quarante ans, 1967 :
dans un gouvernement POMPIDOU sous présidence de DE GAULLE, c'était la grande réforme du régime général de l'OSSO. A l'occasion de cette réforme, l'OSSO était subdivisée en quatre branches au nombre desquelles la branche "OSSO maladie". But de la réforme : mettre un peu de clarté dans le "machin" et faire un sort à la dérive des RIRES maladie.
Entre autres, désormais, à chaque branche est versée une cotisation obligatoire et chaque branche devrait être en équilibre financier - la Cour des Comptes y veillerait -. Cette réforme faisait suite à la création d'un "Centre d'études supérieures de sécurité sociale" formant les directeurs gérant l'organisation hiérarchique pyramidale qu'était le régime général de l'OSSO.


Il y a soixante ans, 1947 :

dans un période politique pour le moins troublée, c'était, en France, le lancement effectif du régime général de l'OSSO. Le régime commençait à recevoir des cotisations des employés de l'industrie et du commerce qu'il dépensait immédiatement et intégralement pour leur fournir des RIRES au cas où et pour se servir au passage – toute peine mérite salaire -.
Mais cinq ans plus tard, en 1952, dans un rapport passé inaperçu ou presque, la Cour des comptes s'émeuvait de l'augmentation des RIRES maladie.


3. La procédure d'alerte 1947-2007 :

1947-2007, ce sont donc 60 années d'augmentation des RIRES maladie, dans quoi certains autoproclamés omniscients voient une "dérive" depuis 1952 !

Ce sont aussi 60 années d'augmentation des cotisations obligatoires (en assiette et en taux), 60 années de coercition croissante de vous et moi par les hommes de l'OSSO seuls, puis par les hommes de l'OSSO maladie et ceux de l'Etat (et de tous ses satellites, de création ancienne ou récente), au prétexte de la "dérive" des RIRES maladie, au prétexte de ne pas abandonner l'OSSO, maladie ou autre, au prétexte de ne pas abroger l'obligation d'OSSO maladie faite à vous et moi.

Ce sont surtout 60 années de coercition croissante des thérapeutes, de mise de ces derniers sous la cloche de bureaucrates qui ont la double prétention de faire coïncider RIRES maladie et cotisations maladie obligatoires au niveau qu'ils jugent bon, et d'assujettir, en conséquence, l'offre des thérapeutes et la demande de vous et moi, en passant outre le "colloque singulier" séculier.

La franchise mensongère "quadricible" ourdie aujourd'hui par le gouvernement, si elle doit voir le jour, ne rendra peut-être pas encore fatale la prétention des hommes de l'Etat, mais elle y contribuera à coup sûr, et peut-être une bonne fois pour toutes !

 

Georges Lane

Principes de science économique

  

Tous les articles publiés par Georges Lane

 

Georges Lane enseigne l’économie à l’Université de Paris-Dauphine. Il a collaboré avec Jacques Rueff, est un membre du séminaire J. B. Say que dirige Pascal Salin, et figure parmi les très rares intellectuels libéraux authentiques en France.

 

Publié avec l’aimable autorisation de Georges Lane. Tous droits réservés par l’auteur

 

 

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