L�une des grandes questions de
la fin de l�ann�e 2013 �tait de savoir comment le march� des bons du tr�sor
r�agirait � la r�duction des achats d�obligations qui d�coulerait de la
r�duction de ses achats d�obligations par la Fed. Si la Fed �tait capable de mat�rialiser
son projet, ses 45 milliards de dollars d�achats mensuels de bons du tr�sor pourraient
�tre �norm�ment r�duits avant le quatri�me trimestre de 2014. Puisque ces
achats ont au d�part repr�sent� une grande partie de l��mission d�obligations
des Etats-Unis, beaucoup ont pens�, y compris moi-m�me, que la diminution de
cette demande finirait par forcer le prix des bons du tr�sor � la baisse.
Sans l�intervention de la Fed, les taux d�int�r�ts devaient grimper.
Mais pr�s de cinq mois plus
tard, les rendements des obligations sur dix ans sont inf�rieurs de 50 points
de base � ce qu�ils �taient � la fin de l�ann�e 2013, malgr� le fait que la
Fed ait officiellement diminu� de moiti� ses achats d�obligations mensuels.
Il semblerait que bon nombre d�autres acheteurs se soient pr�par�s � remplir
le vide ainsi cr��. Beaucoup ont conclu que l�oncle Sam n�a, apr�s tout, pas
besoin de la Fed. Mais un coup d��il � l�activit� internationale sur le march�
des bons du tr�sor r�v�le certaines curiosit�s qui doivent �tre expliqu�es.
Au cours de ces quelques
derniers mois, la Belgique a commenc� � agir de mani�re plut�t excentrique, m�me
aux yeux des Belges. Le petit pays de 11 millions d�habitants n�a pas d�cid�
d�arr�ter de faire des gaufres et du chocolat. Il a d�cid� d�augmenter ses
achats de bons du tr�sor� et pas qu�un petit peu. Selon les plus r�centes
donn�es publi�es par le D�partement du tr�sor des Etats-Unis, depuis ao�t
2013, des entit�s belges ont achet� 215 milliards de dollars de bons du
tr�sor am�ricain. Ce chiffre est �quivalent � la moiti� du PIB du pays, et
repr�sente 20.000 dollars pour chaque habitant du pays. Avant cette date, la Belgique
d�tenait en moyenne 170 � 190 milliards de dollars de bons du tr�sor. Ce
total a augment� de 130% en seulement sept mois, avec 381 milliards de
dollars enregistr�s en mars. Ces achats ont repr�sent� 61% de la hausse
totale des r�serves �trang�res de bons du tr�sor sur la p�riode. Puisque la Belgique,
en septembre dernier, poss�dait moins de 3% des r�serves de bons du tr�sor
d�tenues par l��tranger, ce comportement est en effet bien �trange.
Nous ne savons bien entendu
pas qui exactement se cache derri�re ces transactions. Tout ce que nous
savons avec certitude, c�est qu�une chambre de compensation belge du nom d�Euroclear a des chances d��tre responsable de la gestion
de plus de 200 milliards de dollars de bons du tr�sor. Il est incroyable,
dans notre monde o� chaque email est pass� au crible pour des raisons de
s�curit�, que des centaines de milliards de dollars puissent traverser les
fronti�res sans que personne ne sache vraiment ce qu�il se passe. Une telle
chose n�est bien entendu possible que si les sources officielles elles-m�mes
sont impliqu�es.
Ce qui est certain, c�est que
le gouvernement belge n�est pas derri�re ces transactions. Les chiffres sont
simplement trop �lev�s. C�est particuli�rement �vident pour ce qui concerne
le premier trimestre de 2014, au cours duquel les achats ont atteint une
moyenne de 41,5 milliards de dollars par mois (janvier a �t� le plus gros
mois, avec 54 milliards de dollars). L�un des acheteurs europ�ens potentiels
pourrait �tre la Banque centrale europ�enne. Mais pourquoi la BCE
voudrait-elle accro�tre des achats que la Fed �tait suppos�e diminuer ?
Il est largement reconnu qu��
mesure que le flux de capital augmente exponentiellement en traversant les
fronti�res, et que les syst�mes financiers deviennent globalement plus
int�gr�s, la coop�ration entre les banques centrales augmente. C�est
particuli�rement vrai pour ce qui est de la R�serve f�d�rale et de la Banque centrale
europ�enne, qui ont coordonn� leurs politiques face � la r�cession en 2008 et
la crise europ�enne de la dette en 2011. Savoir avec pr�cision comment et
pourquoi ces banques ont travaill� ensemble est quelque peu plus complexe.
A la fin de l�ann�e 2011,
alors que la crise en Gr�ce, en Espagne, en Italie et au Portugal mena�ait de
fracturer l�Union europ�enne et de mettre fin � l�euro, le Wall Street Journal a report� que la R�serve f�d�rale s��tait engag�e dans un � plan
de refinancement indirect � des banques europ�ennes. Gr�ce � ce qui a
�t� connu plus tard sous le nom de � swap temporaire en dollars �,
la Fed a envoy� des milliards de dollars � la BCE pour qu�elle puisse
refinancer ses banques. Le Journal
a �galement sp�cul� sur le fait que ces
arrangements ont �t� mis en place afin de contourner des restrictions l�gales
qui emp�chait � la BCE de pr�ter directement aux banques. Cet arrangement a
�t� qualifi� de � byzantin �, et certains se sont demand� si son
objectif �tait de confondre la presse et les investisseurs quant � qui refinan�ait qui. Dans tous les cas, le programme semble
avoir maintenu les banques europ�ennes en �tat de solvabilit�.
Ce qu�il se passe en Belgique ne
pourrait donc �tre qu�un quiproquo de banques centrales. Notez que l�ancien
membre du Congr�s Ron Paul a partag� aujourd�hui mon id�e � la radio. Bien qu�il
n�y ait pas de canon fumant, ces achats laissent certainement pr�sager des
efforts coordonn�s. L�id�e que les march�s financiers restent stables en
p�riode de r�duction de ses achats d�obligations par la Fed est un �l�ment
critique du succ�s du programme. Toute forme de panique sur le march� des
obligations entra�nerait une hausse des rendements, ce qui aurait des effets
n�gatifs sur les prix des actions et la confiance envers l��conomie. Si cette
panique persistait plusieurs semaines, la Fed se trouverait forc�e de faire
machine arri�re. Et une perte de cr�dibilit� limiterait sa capacit� d�agir dans
le futur.
Mais qu�en serait-il si la BCE
commen�ait � acheter des bons du tr�sor alors que la Fed r�duit ses achats,
si les achats de la BCE �taient plus importants que la r�duction appliqu�e
par la Fed ? Les achats de la Fed n�appara�traient que comme un �l�ment
marginal des taux d�int�r�ts proches de z�ro. ce n�est peut-�tre pas une
co�ncidence si les Belges ont commenc� � acheter apr�s que la Fed ait r�duit son
programme de QE. Quelque chose sent le pourri, non pas au Danemark, mais
quelques centaines de kilom�tres au sud-ouest.
Plut�t que de chercher �
expliquer la hausse des r�serves d�obligations de la Belgique, les
observateurs du march� ont les yeux riv�s sur Mario Draghi,
qui a r�cemment annonc� la mise en place d�une campagne de rachat d�obligations
similaire � un QE afin d�affaiblir l�euro et de soutenir l�inflation en
Europe. S�il mettait son projet � ex�cution, combien de temps la BCE
pourrait-elle combattre sur deux fronts en m�me temps � porter de l�eau pour la Fed tout en achetant des
obligations europ�ennes ? Toute campagne clandestine mise en place par
les Europ�ens pour supporter les bons du tr�sor ne pourra �tre que passag�re.
Et
personne n�en parle. C�est l� le testament de la nature bovine de nos m�dias
financiers. Mais qu�importe, puisque les taux sont bas et les prix des
actions �lev�s ? Prenez un autre chocolat. Les belges sont les
meilleurs.
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